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Réflexion sur les chevaux de service à Montréal

Bien étonnante question en 1905 !

Et surprenants constats !

Voilà une question fort intéressante. Nous trouvons une solution affirmative dans certains faits de leur vie relevés par un conducteur d’ambulance, par un homme de notre police à cheval et par un capitaine de pompiers.

Les chevaux qui semblent le mieux doués du côté de l’intelligence, si on peut appeler ainsi cette faculté de penser chez les bêtes, nous pouvons dire que ces chevaux ne se trouvent pas seulement dans les cirques.

Notre brigade possède des chevaux encore mieux dressés. De même l’hôpital Notre-Dame. Ainsi l’hôpital Notre-Dame a deux chevaux gris qu’elle met au service des ambulances. Eh bien ces chevaux accomplissent chaque jour des actes qui ne peuvent pas ne pas nous étonner.

M. Arthur Gravel qui les conduit, dans les courses aux accidents, les considère comme les bêtes les mieux dressées qu’il ait jamais rencontrées.

Lorsque le gong résonne, les deux chevaux ouvrent eux-mêmes la porte de leur stalle en déplaçant le verrou avec leur bouche. Puis ils vont se placer sous le harnais et se passent la tête dans le collier sans l’aide du charretier.

La police à cheval compte également un admirable cheval noir.

Celui-ci fait tous les trucs imaginables. Il vous donne un « shake hand », parfait. Lorsqu’il désire quelque friandise, il s’approche de son maître et se fait plus caressant que jamais.

Notre brigade possède aussi un grand nombre de chevaux remarquables.

L’énumération de toutes leurs qualités serait trop longue. Il faudrait tout un volume pour les relater. La brigade de New-York a aussi quelques chevaux remarquables par leur instinct.

Par exemple, il y a « Harmony ». Ce cheval est surtout remarquable pour son dédain qu’il a pour ses semblables. Harmony » est un magnifique cheval gris qu’on attelle à l’engin No. 9. On le laisse seul dans sa stalle située dans un coin de la pièce où elle se trouve. Si une autre bête s’avance, « Harmony » s’élance sur elle, la rue et la mord, s’il le peut. Et puis il a l’âme très dure — si tant est qu’il ait une âme. Ainsi il n’a de plaisir plus grand que d’épuiser son compagnon de trait. Il y a plusieurs chevaux qu’il a esquintés et fourbus.

« Dick » est un autre cheval fameux. C’est un voleur celui-là. Si vous approchez de lui, vous pouvez être assuré qu’il vous manquera quelque chose ; il vous aura enlevé soit votre mouchoir, soit votre montre, si vous n’y prenez, garde. «Dick » a acquis cette mauvaise habitude lorsque les pompiers lui apportaient du sucre. Maintenant, il fouille dans les poches de tout le monde. Lorsqu’il est pris, il donne si gentiment le pied qu’il faut lui pardonner. […]

« Poppers Boy » a également une grande renommée. Il peut additionner, soustraire et multiplier.

Dites-lui de compter cinq : il frappe cinq fois le sol de son sabot.

Demandez-lui de soustraire 5 de 7. Il indiquera le résultat en frappant deux fois le sol.

« Poppers Boy » peut dire l’heure en regardant une montre. Est-il 4.30 heures. Il frappe le sol quatre fois et tient son pied levé un instant pour indiquer la demie. Il danse et accomplit d’autres faits extraordinaires.

On pourrait donc continuer longtemps la série de tant d’exploits.

Mais il y a un fait assez curieux quand il s’agit du choix des bêtes. Ce n’est pas toujours celles qui paraissent les plus éveillées qui sont les mieux douées. Il arrive très souvent que ce sont celles qui paraissent le moins qui valent le mieux après leur transformation.

Maintenant, comment s’opère cette transformation ?

Un vieux capitaine de sapeurs-pompiers, que nous interrogions hier, nous a répondu d’une façon fort plausible : Les longues heures passées dans les casernes ou sur le poste, leur vie commune et leur camaraderie, si on peut s’exprimer ainsi, avec les hommes qui les chérissent, le peu de sommeil et les réveils subits, les incidents de tout genre auxquels ils assistent, enfin leur vie anormale ne sont-elles pas de nature à développer leur instinct, et puis la persistance dans ces actions n’est-elle pas propre à développer tant cet instinct, qu’on se demande si dans le cheval il n’y a pas de l’homme comme dans l’homme il y a du chien.

 

Le Canada (Montréal), 4 mars 1905.

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