La malédiction du vendredi et du chiffre 13
D’après les observations répétées, on a remarqué que, même le vendredi ordinaire, le nombre de voyageurs était bien moindre dans les chemins de fer que les autres jours.
Il en est de même pour les omnibus; les vendredis et les 13, la recette est toujours moins élevée. On a calculé que sur dix personnes six au moins évitaient de commencer une affaire un vendredi et un 13… Sur dix, sept ne se mettraient treize à table sous aucun prétexte, persuadés qu’un convive doit mourir dans l’année.
Tout le monde connaît l’origine de ces superstitions : le vendredi est regardé comme néfaste parce que c’est ce jour-là que Jésus-Christ fut crucifié. Le 13 est fatal parce qu’au dernier repas du Christ, des treize apôtres présents un devait le trahir. Voilà les seules raisons qui ont donné cours à ce préjugé.
Autrefois, cette superstition était encore plus accréditée qu’aujourd’hui.
Dans le nord de la France, on n’entretenait rien les vendredis et les 13. Les cultivateurs n’allaient même pas aux champs. Une loi défendait de soumettre, les vendredis, les criminels aux épreuves du feu et de l’eau. Au quatorzième siècle, il était défendu à un capitaine de livrer bataille un vendredi. On lit dans de vieux manuscrits que plusieurs combats, qui devaient être livrés par Philippe VI aux troupes du roi d’Angleterre Edouard III dans la plaine Saint-Denis, furent remis au lendemain parce que c’était un vendredi.
En 1675, Colbert chercha les moyens «d’oster ces scrupules de l’espryt des matelots» à la suite d’une plainte de l’amiral de Valbelle, qui, commandant une flotte, ne put mettre à la voile, après qu’il avait donné ordre de partir un vendredi. […]
Pour combattre ces préjugés, il y aurait, croyons-nous, un moyen bien simple, ce serait de relever tous les événements heureux qui sont arrivés tous les 13 et tous les vendredis.
Le Canadien (Québec) 4 janvier 1886.
L’illustration du chiffre 13 provient de ce site.