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À l’heure où l’obésité n’a jamais été aussi présente

Dizzy, son nom

Dizzy, son nom

 

Voici l’évocation de personnes de grand poids.

Emma Markley, Américaine dont les journaux d’outre-Atlantique rapportent la mort, commença, dès l’âge de vingt et un ans, à se signaler par les proportions de son embonpoint qui, à partir de là, ne faisant que croître et embellir, fut bientôt phénoménal.

Il y a juste dix ans qu’elle prit le parti de s’en faire des rentes; et n’était-il pas juste qu’elle vécut de ce qui l’empêchait de travailler ?

Elle allait donc, s’y exhibant de ville en ville. C’est à Philadelphie qu’elle exposa pour la dernière fois et fit publiquement contrôler ses 62 pouces et demi de taille et son poids de 550 livres (246 kilogrammes).

Après en avoir vécu dix ans, Emma Markley en est morte, son fauteuil s’étant écroulé sous elle. Elle se fit dans sa chute une blessure qui la conduisit au cercueil, lequel avait 6 pieds 10 pouces de long (soit 2 mètres 05); d’où l’on peut conclure que, polysarcie à part, Emma était encore ce qu’on nomme une belle femme.

La polysarcie, c’est plus simplement l’obésité. D’ailleurs, j’en suis fâché pour l’Union américaine qui fait tant de bruits de ses gens gras, mais Emma Merkley n’occupera dans les fastes de l’obésité qu’un rang ordinaire.

On voit à l’École de médecine de Paris le plâtre de Marie-Françoise Claye, dont l’histoire nous a été laissée par Dupytren. À trente-six ans, cette femme qui n’avait que 5 pieds 1 pouce de haut (1 mètre 64) avait 5 pieds deux pouces (1 mètre 66) de circonférence à la taille; c’est 8 centimètres de plus que l’Américaine. La tête de la Française se perdait au milieu de deux énormes épaules. Le cou avait disparu. Les coussins de graisse qui comblaient les creux de l’aisselle forçaient les bras à se tenir éloignés du corps. Il lui devint impossible de marcher. Bientôt même, elle ne put rester couchée. Il fallut demeurer nuit et jour dans un fauteuil. Elle mourut à L’Hôtel-Dieu.

Une Allemande, âgée de vingt-cinq ans et nommée Frédérique Ahrrens, qui se faisait voir à Paris dans les premières années du règne de Louis-Philippe, pesait 225 kilogrammes et n’avait, tant de haut que de taille, 1 mètre 75.

Le comté de Lincoln, en Angleterre, a possédé un homme gras du poids de 264 kilogrammes, d’une circonférence de trois mètres 04 dans l’habit duquel sept personnes de taille ordinaire pouvaient entrer. […]

En 1853, subitement étouffé par la graisse, mourut dans son fauteuil, à Batavia, un planteur du poids de 321 kilogrammes. Il en était venu à augmenter de 750 grammes et même d’un kilogramme par jour. À 22 ans, il pesait déjà 281 kilogrammes. Arrivé à 308, il pouvait encore prendre soin de sa plantation. Puis vint cet accroissement prodigieux qui promptement détermina la mort.

On cite un Gallois du nom de Hopkins qui aurait pesé 448 kilogrammes, et on lui décerna le titre du roi des obèses. Un autre Anglais, Sponer, qui ne pesait que 505, était tellement gras qu’un couteau dont il lui entra 12 centimètres dans la région du ventre ne lui entama que le cuir; qu’on juge par là de ce que devait être l’enveloppe de Hopkins.

Combien pesait ce duc de Wurtemberg pour qui, lors du banquet donné à l’Hôtel de Ville en l’honneur du mariage de Napoléon et de Marie-Thérèse, dut être entaillée la table du festin afin qu’il pût y loger son ventre.

Victor Meunier.

 

«La polysarcie ou l’obésité», La Nature (Paris), tome 27 (1886), p. 166s.

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