Skip to content

Après une longue période de chaleur et de sécheresse…

changement de temperatureIl fallait que ça vienne enfin.

La tempête attendue, espérée, qui devait mettre un terme à la chaleur tropicale de ces derniers jours et parer aux désastreux effets d’une sécheresse prolongée, est arrivée hier soir, à l’heure traditionnelle, annoncée longtemps d’avance par un grondement continu du tonnerre dans le lointain.

Même, pour les plus distraits, il devint manifeste, vers quatre heures de l’après-midi, alors que le thermomètre était rendu à 96 degrés de chaleur [35, 56 Celsius], qu’il se brassait quelque chose dans la direction de l’ouest. Ouragan, cyclone ou simple tempête électrique, c’était certainement l’un ou l’autre ou encore l’un et l’autre et le tout ensemble.

Une combinaison de vent, de pluie et de foudre a, en effet, été le point culminant de la vague de chaleur que nous avons eue, et son effet, pour avoir été prompt, n’en a pas été moins terrible.

Pendant un temps, le bouleversement atmosphérique fut tel que la nature a perdu son contrôle sur les êtres animés. Les enfants criaient et pleuraient sans s’en rendre compte, les chiens hurlaient et les oiseaux, affolés, se jetaient dans les fenêtres des maisons.

Toute la vie commerciale de la métropole fut paralysée pendant plusieurs heures, mais heureusement le phénomène s’est produit sans causer de perte de vie.

À cinq heures de l’après-midi, le ciel passa soudain du bleu éblouissant au noir gris-acier qui est le sûr présage de tempête. On aspirait après l’ondée bienfaisante qui libérerait la population du poids de la torride chaleur qui sévissait quelques minutes auparavant, mais l’on fut quelque peu déçu, car la pluie fut précédée d’un simoun fort désagréable.

Tranchant sur le fond gris-noir du ciel, un énorme nuage d’un noir d’encre roula soudain, venant de l’ouest, et, en trois secondes, fondit sur la ville, qu’il sembla envelopper toute entière. Avec un sifflement aigu et terrifiant, il passa au-dessus de nos têtes, tordant les arbres et soulevant une vague de poussière aveuglante qui couvrit toute la ville.

La rafale filait à ce moment à une vitesse de 30 à 40 milles à l’heure, et en quelques secondes elle sema la destruction sur son passage, renversant les arbres et rompant les fils électriques. Dans le sillage de l’ouragan, s’engouffra un torrent de pluie qui abattit la poussière et rafraîchit instantanément l’atmosphère, pendant que la foudre s’allumait aux quatre coins du ciel et tonnait comme vingt pièces d’artillerie. […]

Bref, ce fut la manifestation atmosphérique la plus bruyante et la plus animée que nous ayons eue, à Montréal, depuis plusieurs années.

Ce fut, en somme, un digne couronnement de la journée la plus chaude dont fassent mention les registres de l’observatoire de McGill depuis le 16 juillet 1901, alors que le mercure s’éleva à 94 degrés au-dessus de zéro.

 

La Patrie (Montréal), 8 juillet 1908.

No comments yet

Publier un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Vous pouvez utiliser des balises HTML de base dans votre commentaire.

S'abonner aux commentaires via RSS