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Ah, ces ambulants !

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Invariablement, on accompagne leur passage de dénigrement. Ils portent avec eux les maux de la terre. Et on espère leur départ le plus rapidement possible.

Est-ce bien vrai tout ce qu’on leur prête lors de leur venue ? Vols, rapines, disparitions d’enfants, d’oiseaux de basse-cour, et quoi encore. On se le demandait : À quand une grande histoire québécoise des gens de passage ?

Voici des Bohémiens à Nicolet le lundi 20 août 1883. Une semaine plus tard très exactement, le quotidien montréalais L’Étendard y va de ce texte.

Nicolet. Lundi vers 4 heures du soir, une troupe de bohémiens a fait invasion dans notre ville.

Jamais encore, personne, ici, n’avait vu de figures plus repoussantes, ni de spectacle à la fois plus triste et plus grotesque. La troupe compte une vingtaine de personnes, hommes, femmes et enfants, outre un âne, cinq ours, trois singes et trois chevaux.

Cette troupe ne paraît être autre chose qu’une association de voleurs de chemin, car, sur tout le parcours de leur route, ils ont laissé des traces de leur passage. Dans les concessions comme dans les villages, ils exercent des actes de brigandage intolérable avec sans gène et un sang-froid sans bornes.

Tous les jardins situés le long de leur chemin ont reçu l’honneur de leur visite. Il va sans dire qu’en sortant, les branches et les feuilles seules y restaient; quand aux concombres, melons, raisins, carottes, etc., on en a plus revus. À certains endroits, les dommages causés par eux ont été considérables.

Ils ne sont qu’à demi vêtus et ne forment avec leurs animaux qu’une seule et même famille. Les enfants sont mis dans des sacs de toile et suspendus sur le dos des chevaux.

Arrivés dans la ville, ils ont reçu ordre du maire de filer leur chemin droit et, en moins de 10 minutes, une centaine de personnes les ayant entourés, ils jugèrent tout à fait prudent de traverser la rivière et de se diriger vers La Baie[-du-Febvre]. C’est ainsi que nous avons pu nous débarrasser de ces figures sinistres que l’on dit être armées jusqu’aux dents.

Plût à Dieu que nous ne les revoyions plus !

* * *

Après la visite des Bohémiens à Nicolet et Baie-du-Febvre, les voici, sur la rive nord du fleuve, à Deschambault. L’Étendard du 29 août 1883 les dit être des Turcs et écrit :

La paroisse de Deschambault s’est vu inondée, la semaine dernière, d’une vraie plaie égyptienne. Une caravane de vingt-huit Turcs, hommes, femmes et enfants, six ours, des chevaux, ânes et toutes espèces d’animaux, sont arrivés des Trois-Rivières, où on les a chassés.

Les chevaux portaient de chaque côté du dos une série de havre-sacs dans lesquels on plaçait les petits enfants. Les femmes portaient leurs plus petits enfants dans des paniers pendus à leur dos. En passant à chaque maison, ils criaient : du pain ! du pain ! Les petits enfants criaient en s’agitant la tête comme des petits oiseaux du ciel.

Les hommes, eux, ne laissaient passer aucun jardin sans s’y munir d’une bonne quantité de légumes, carottes, navets, etc. Si un beau pré s’offrait à eux, ils y installaient leurs chevaux et leurs ânes avec un sans-gêne et une audace tels que plusieurs cultivateurs ont dû prendre le bâton pour les faire déguerpir. Ils nourrissaient leurs ours aux dépens des troupeaux de moutons qui se trouvaient dans les environs.

Ils ont passé plusieurs jours à Deschambault, près du quai Morin, à exécuter, moyennant quelques centins, des jeux avec leurs animaux.

Enfin, ils ont quitté ces parages pour les paroisses du sud. Ils cherchent des pays chauds.

* * *

La Gazette de Joliette écrit à leur sujet le 4 septembre 1883 : Les Bohémiens qui ont traversé Montréal il y a quelques semaines sont rendus à Lotbinière; ils ont été chassés de ce village, ainsi que de tous ceux où ils ont voulu séjourner.

 

Ci-haut, L’Homme à l’ours, tout petit santon de sept centimètres, peint à la main, provient de la fabrique provençale Le Moulin à huile.

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