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Le Tyran tritri

Bien occupé à tondre une pelouse fort longue, je prends quand même quelques secondes, tonte faisant, pour ne rien rater de la vie autour de moi. Soudain, qui vois-je au sommet du grand pommetier ? Le Tyran tritri (Tyrannus tyrannus, Eastern Kingbird). Pause alors, le temps de l’immortaliser.

Voilà un oiseau solide, confiant, qui arrive même à se moquer des corneilles et des rapaces. Il a pour lui d’être bien né pour affronter la vie. Vous vous promenez dans les campagnes, jetez un œil, vous ne pouvez le manquer sur les fils ou autrement, capable de monter à la verticale pour aller gober un insecte. Je l’aperçois beaucoup sur mon chemin et sa présence ne semble pas décliner au fil des années.

Je suis heureux de le voir ici aujourd’hui, car nous étions le 3 juin 2009 quand il s’est montré la dernière fois, le jour où une petite équipe de la Semaine Verte de Radio-Canada — mes amis Aubert, Gaétan et Daniel — était venue tourner un reportage sur mes oiseaux.

Avant que l’oiseau ne reparte pour d’autres lieux, voyons tout de suite ce qu’en dit James M. LeMoine (Ornithologie du Canada, 1861), qui l’appelle courtement «Titiri» ou «Tri-Tri».

Le Titiri est fort matinal; il se fait entendre longtemps avant le lever du soleil; c’est aussi le dernier endormi, car il crie encore après que la nuit est presque close. La cime des arbres, tels que les ormes, les bouleaux, est l’endroit qu’il paraît préférer; c’est de là qu’on le voit s’élancer après l’insecte ailé, le saisir adroitement, retourner aussitôt à sa branche favorite et la quitter de nouveau, pour fondre sur le premier qui se montre dans les environs. […]

Sa hardiesse fait qu’on l’approche aisément, et le poste à découvert, qu’une proie ailée comme lui et toujours fugitive le force d’occuper une partie du jour, l’expose aux coups meurtriers du chasseur; mais on le ménage, et on a raison, car c’est pour les habitations, où il se plaît plus qu’ailleurs, un gardien vigilant qui veille sans cesse à la sûreté de la volaille.

Les Éperviers , les Corneilles craignent de se montrer où est le Titiri. Doué du courage des plus grands oiseaux de rapine, c’est surtout lorsqu’on cherche à lui enlever sa jeune famille, qu’il en donne les preuves les plus frappantes; son audace devient fureur; il se précipite sur le ravisseur, le poursuit avec intrépidité, et si, malgré ses efforts, il ne peut sauver ses petits, il en prend soin dans la prison où ils sont retenus.

Au sujet de la Corneille et du Tyran, LeMoine cite en bas de page un texte de son ami Louis-Édouard Glackemeyer (1793-1881), notaire à Québec et flûtiste, qui aimait assurément, lui aussi, se livrer à l’observation des oiseaux.

Ce dernier écrit : La Corneille, qui est si fanfaronne quand elle s’en prend au pauvre Hibou, qui n’y voit goutte le jour, n’a d’autre défense qu’une honteuse fuite à opposer aux attaques d’un tout petit oiseau que nos habitants appellent «Tri-tri». Il fait son nid au haut des grands arbres et, lorsque la Corneille veut s’y reposer dans ses courses journalières, de la montagne à la rivière Saint-Charles, le Tri tri, alarmé pour la sûreté de sa ponte ou de ses petits, fond de suite sur la Corneille, se cramponne sur son dos et lui fait de douloureuses blessures avec son bec. La Corneille s’enfuit à tire d’ailes en jetant les hauts cris, poursuivie par son ennemi qui ne cesse de la persécuter, que lorsqu’il l’a conduite assez loin pour n’en avoir plus rien à craindre.

Dans son guide Les Oiseaux de l’est de l’Amérique du Nord (Laprairie, Éditions Broquet, 1989), Roger Tory Peterson mentionne que l’oiseau «hiverne du Pérou à la Bolivie».

Si l’oiseau a le bec ouvert sur deux des images, c’est sans doute à cause de la chaleur du jour, 280 (340 avec humidex).

Le 14 mai dernier, mon ami René avait la présence chez lui du Tyran tritri.

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