Traverser novembre
Dans ma campagne, novembre est le mois le plus pauvre en variétés. Et tout attend, dirait-on. Quoi ? Je l’ignore. Aujourd’hui, il fait fort beau, mais c’est le plus complet silence. Deux ou trois mésanges vont et viennent aux mangeoires. Un geai ou deux aussi. Un merle s’attarde, seul, dans les pommettes. Et jamais un chant, jamais un cri. De personne. J’entends bien les oies blanches, de passage tout au loin. Mais si loin. Zébreuses de ciel.
Soudain, un petit papillon rosacé, dont j’ignore le nom, va son chemin, tout à fait seul. Audacieux.
Et puis quoi ? D’humbles faits. Une plume qui s’est prise dans un arbre, excitée depuis par le vent. Une pommette écrasée au bout d’une grosse branche morte, comme on n’en voit jamais, et qui tient dans le vide. L’œuvre sans doute d’un écureuil créateur. Petite tache rouge soudain dans du brun. Retrouver l’éternité dans des choses de rien. Des sourires.
Maffesoli, dans L’Instant éternel, dit que la répétition rituelle, la routine quotidienne, étonnamment, permet d’échapper au temps linéaire, au temps qui passe, permet de retrouver l’éternité. Dans la durée éphémère, se cacherait le temps éternel.