Une relique de saint Blaise à Saint-Blaise
Vous vous souvenez probablement que nous avions parlé de la fête de saint Blaise le 3 février. Ce jour-là, les catholiques, qui craignent les «maux de gorge», se rendent à l’église pour qu’un célébrant leur passe un cierge béni sur la gorge, ou mieux une relique de saint Blaise. En septembre 1894, Saint-Blaise-sur-Richelieu, une municipalité formée deux ans plus tôt d’une partie des territoires de Saint-Jean-d’Iberville, L’Acadie et Saint-Valentin, est en fête. C’est qu’on reçoit l’Archevêque de Montréal venu inaugurer l’église et apportant une relique de saint Blaise. Le journal Le Franco-canadien a envoyé son représentant, qui publie un compte-rendu de la rencontre le 14 septembre 1894.
Arcs de triomphe, drapeaux, banderoles aux couleurs vives, décorations de toute sorte, population en liesse, figure épanouie, on sentait un jour de fête et de bonheur. C’en était un. Outre l’inauguration solennelle de l’église fraîche terminée, Mgr l’Archevêque venait installer une relique précieuse du patron de la paroisse, saint Blaise.
Le quatre septembre au soir, Sa Grandeur, escortée de plus de trente prêtres venus de diverses parties du diocèse, descendait des chars, et, accueilli par la foule venue à sa rencontre, se rendait processionnellement à l’église qui, revêtue de sa riche toilette, ouvrait ses portes toutes grandes pour la première fois au premier Pasteur de ce diocèse. […]
Cette cérémonie n’était que le prélude de celle du lendemain. Aussi le lever d’un beau jour était désiré, les vœux furent exaucés. À l’heure matinale, l’église commençait à se remplir…, les confessionnaux assiégés, les communions nombreuses, les messes se succédant aux autels, la piété, le recueillement, l’empressement de la foule, tout annonçait un jour extraordinaire.
À 9.30 heures, la procession se mettait en marche et l’on transportait les saintes reliques du presbytère à l’église qui devait hériter de ce riche trésor, en faisant retentir l’air d’hymnes et de chants sacrés. […] La relique déposée aux pieds de la statue de saint Blaise élevée sur un haut piédestal tapissé de fleurs naturelles aux diverses nuances, Mgr se revêtit de ses habits pontificaux pour la messe qu’il chanta lui-même. […]
Un grand banquet, servi par les dames de la paroisse, dans l’ancienne chapelle, qui réunit au-delà de soixante convives, termina cette magnifique fête qui restera à jamais gravée dans la mémoire de toutes les personnes présentes.
La relique obtenue de l’Évêque de Posphyre mesure 4 ½ pouces de long. C’est un fragment de côte ex costulis, parfaitement conservé. Les citoyens jubilent de posséder un aussi riche trésor, aussi leur confiance en saint Blaise va toujours grandissant, et cette dévotion peu connue au pays se répand de plus en plus et l’on voit fréquemment des pèlerins de paroisse environnante venir invoquer saint Blaise, et en particulier la paroisse de Saint-Jean, qui envoya cette année 900 pèlerins prier le grand saint Blaise contre les différentes maladies et en particulier les maux de gorge.
Saint-Blaise devient donc un lieu de pèlerinage pour les personnes qui veulent se prémunir de la maladie, surtout des maux de gorge. Au 20e siècle, on mettra un nom sur ces maux de gorge : le goitre. On découvrira que cette maladie venait d’une carence alimentaire, d’un manque d’iode. Et le culte à saint Blaise perdra de son lustre.
L’illustration — saint Blaise de Sébaste par Hans Memling — provient de la page Wikipédia consacrée au personnage.