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Pas de Chinois à Saint-Hyacinthe !

En 1890, un citoyen de Saint-Hyacinthe, insatisfait de la buanderie d’un certain Côté, invite des Chinois à venir ouvrir un pareil commerce dans sa ville. Mais voilà que des jeunes de l’endroit cassent les vitres du local chinois et sont convoqués devant le juge. Un quidam de l’endroit, qui signe Sam, mécontent qu’on s’en prenne ainsi aux jeunes, écrit au journal L’Artisan. Et La Tribune reproduit sa lettre le 26 septembre 1890.

Le dernier acte du procès dans l’affaire des Chinois vient de se jouer. Remontons un peu au prologue. Un certain individu, mécontent de M. Côté, de la buanderie, fait l’officieux et, par son entremise, engage des Chinois à venir s’établir à St-Hyacinthe.

Les Chinois viennent et sont à peine établis que des jeunes gens en train de s’amuser probablement, mais irréfléchis comme on l’est à cet âge, où l’on jouit de la jeunesse, vont briser les vitres de la résidence que les Chinois ont louée pour leur buanderie.

Le lendemain, ces étourdis reconnaissent leur faute et font offrir de payer les dommages. Pour une raison ou pour une autre, on refuse le dédommagement, on réclame davantage, et finalement on poursuit en justice deux jeunes gens sur lesquels on a le plus de présomption.

Tout le monde connaît les détails de l’enquête préliminaire; le résultat est que deux jeunes gens respectables, appartenant à de bonnes familles, en sont réduits à rendre compte de leur conduite au prochain terme de la Cour du Banc de la Reine, et devront payer des dépenses et des frais considérables encourus pour leur défense.

Voilà ce qu’a produit l’importation des Chinois en cette ville : deux jeunes gens en butte à une poursuite judiciaire disgracieuse et obligés de faire des dépenses considérables pour se justifier.

Encore une fois, je ne crois pas qu’il y ait eu malice de la part de ceux qui ont brisé les vitres là où demeurent les Chinois. Il y a eu irréflexion, grave irréflexion, c’est vrai, mais les coupables ont démontré immédiatement qu’ils reconnaissaient la grande légèreté de leur acte en offrant d’indemniser le propriétaire de la maison.

La morale publique n’était pas tellement en danger que l’on dût poursuivre ces jeunes gens en justice; au contraire, la morale eut été mieux gardée si l’on en était venu à un réglement à l’amiable.

Je constate une fois de plus à quels malheureux incidents a donné naissance l’importation chinoise en cette ville. Et c’est partout comme cela, quelque part qu’ils mettent le pied ils sont la cause de désagréments. Il n’y a pas à le nier : si ces désagréments ne viennent pas directement d’eux, ils en sont la cause indirecte.

Je demanderai si nous avons bien besoin de tous ces déballés étrangers qui viennent ici nuire à nos industries locales en leur faisant une concurrence désastreuse et, bien plus, sont la cause de malheureux incidents tels que l’on en voit aujourd’hui ?

Je demanderai quels sont ceux qui méritent nos sympathies, ou des nôtres ou des autres.

Enfin tout est fini aujourd’hui. La justice a décidé; le magistrat a agi suivant sa conscience, et les accusés devront se justifier devant un tribunal supérieur dans trois mois ou à peu près,

D’ici là, les Chinois, citoyens errants, seront peut-être allés chercher fortune sous un autre ciel. Quelque part qu’ils aillent, je ne souhaite pas aux citoyens, dont ils seront les hôtes, la moitié des tracas dont leur arrivée a été la cause à St-Hyacinthe.

En vous remerciant,
M. le Rédacteur.
Votre reconnaissant,
SAM.

 

Ô que ce texte est gênant ! Fort heureusement que le magistrat, lui, a été à la hauteur. Et, à l’heure de nos discussions, dans certains coins enflammées, sur une charte des valeurs québécoises, cet écrit me semble bien de mise.

Je me demande s’il y a quelque part au Québec un cours sur la civilisation chinoise et sur l’apport des Chinois à la culture québécoise. J’aime beaucoup la présence des Chinois au Québec. Sur ce site, en date d’aujourd’hui, le 21 septembre 2013, on trouve 16 articles se référant aux Chinois ou à la culture chinoise.

La photographie prise en 1908 montre une partie du quartier chinois à Montréal, sans doute rue Lagauchetière, près de la rue Saint-Urbain. On la trouve sur le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, au descripteur «Quartier chinois».

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