Les pique-niques (seconde partie)
La table étant mise pour le pique-nique, quoi manger alors ? Retrouvons Jacqueline dans l’Album universel du 1er juillet 1905.
Songeons maintenant au menu qui sera froid, et bon sans être coûteux ni compliqué, surtout si l’on n’a pas d’invités, si l’on n’est pas riche, et que l’on tienne à recommencer souvent la partie.
Du beurre bien frais tassé soigneusement dans un petit beurrier à couvercle, qu’on enveloppera d’un morceau de laine. Au moment du départ, on glissera au milieu du beurre un morceau de glace. Des radis épluchés, lavés, serrés dans un petit sac de toile.
Nombreux sont les plats de viande froide qu’on peut emporter : carré de veau rôti, veau en gelée, volaille rôtie, rosbif, langue en gelée, etc., tout cela contenu dans des boîtes de fer-blanc soigneusement couvertes. Il ne faut jamais envelopper la viande dans du papier, surtout du papier imprimé. Si on préfère, tout en emportant les provisions de la dînette, n’avoir pas à les préparer, on trouvera facilement d’excellentes conserves.
On peut aussi emporter un pâté en croûte, veau et jambon, poulet, canard ou lapin; ceci est un des mets classiques de la dînette. On peut le remplacer par de la galantine de volaille ou des sandwiches de jambon.
Une salade de légumes de saison plaît généralement. On fait blanchir pois, haricots verts, petites pommes de terre, pointes d’asperge, petites carottes. Quand ces légumes, parfaitement égouttés, sont sur le point d’être assaisonnés, on y ajoute quelques tomates. La salade de légumes peut être emportée toute prête dans une soupière ou un saladier. Comme autres légumes : des concombres, melons, tomates, etc.
Comme dessert, un morceau de fromage sera apprécié des gros appétits. Dans des boîtes de fer-blanc, ou dans un petit panier à part, on placera des fruits de saison. À moins que le but de la promenade soit un bois taillis où l’on trouvera bien vite le dessert : fraises, framboises ou mûres. Mais une maman prudente n’escomptera pas trop ce dessert éventuel, et elle se pourvoira de gaufrettes ou de biscuits divers, suppléant au besoin à une cueillette manquée. On peut même emporter assez facilement, dans de petits pots couverts, de la crème prise au chocolat, au caramel, à la vanille.
Si on n’est pas absolument certain de pouvoir se procurer sur les lieux du pique-nique les boissons nécessaires, il faut se résigner à les emporter. Bouteilles de vin et bouteilles d’eau ou d’eau minérale seront renfermées dans un panier, callées avec soin et enveloppées de flanelle mouillée. Un panier à bouteilles ordinaire, en osier, entièrement enveloppé d’une housse qui en dissimule le contenu et ne laisse passer que la poignée, est très commode pour cet usage. Il donne, de plus, la facilité de pouvoir être plongé — une fois débarrassé de sa housse — dans un ruisseau, une pièce d’eau, où les boissons seront vite rafraîchies.
Le café bu froid est très tonique, mais tout le monde ne l’aime pas. Il sera donc bon de joindre à la bouteille contenant le café une petite lampe à alcool, inversible; en quelques minutes, le moka sera brûlant.
Le pain sera transporté soit dans un panier à pain en osier, de forme haute, facile à porter sur l’épaule, ou dans un sac de flanelle doublé de toile blanche. Ce dernier aura l’avantage de pouvoir être, au retour, simplement roulé et mis en poche. Il est vrai que le panier d’osier pourrait contenir toute une moisson fleurie.
Il faut enfin penser aux papas et aux mamans, qui n’ont plus la souplesse de leurs vingt ans, et pour lesquels la dînette serait sans charme s’il fallait s’asseoir sur l’herbe. À leur intention, on se munira de pliants, et, s’il y a des bébés, un petit hamac, si peu encombrant, rendra les plus grands services pour la sieste d’après-midi.
Lorsque plusieurs familles se sont entendues pour prendre part à un pique-nique, on fera bien de s’entendre aussi sur les divers plats que chacun apportera, pour qu’il n’y ait pas trop de «doubles emplois».
Les invitations se font quelques jours à l’avance, et ce sont les messieurs, qui se chargent des frais des voitures et des boissons. Il va sans dire qu’ils s’occupent du transport des paniers, pliants, etc. Les jeunes filles, dans leurs toilettes claires, sont la note la plus gracieuse de ces charmantes parties.
Voyez-les, au milieu du parc; celles-ci — les gracieuses nonchalantes — assises sur le gazon; celles-là, debout et rieuses, le long des fuyantes allées que strient les raies du soleil, et, plus loin, d’autres qui se livrent à des jeux de grâce et d’harmonie, souples attitudes, gestes hardis, toutes légères et fines silhouettes se détachant parmi la poussière lumineuse du paysage d’été, sur le décor de verdure et d’or, d’or et de fleurs, symphonie en blanc et rose, en rose et bleu pâle, ce sont les jeunes filles, et on n’imagine pas de spectacle plus exquis, plus émouvant.
La simplicité de leurs modes enchante nos yeux. Jeunes filles, nos lectrices, soyez simples, et qu’on ne vous prenne pas pour de jeunes «madames». Ne singez pas vos aînées, et ne songez pas à vous vieillir, ne fût-ce que d’une petite année. Votre parure, c’est votre jeunesse, c’est la fraîcheur de votre teint, c’est la charmante gracilité de vos traits. Soyez vous-mêmes et restez-le autant de temps que vous pouvez. C’est la grâce que nous vous souhaitons au moment où s’ouvre l’été, la saison où l’on vous voit mieux et de plus près, dans la clarté des jours de soleil, sur les plages que caresse la mer bleuissante, ou sur les herbes des campagnes diaprées.
La photographie ci-haut fut prise en 1908.
Cher Vous, raconter nos piques-niques d’enfants me gênent tellement ils sont nombreux.Je soupçonne ma mère de les avoir encourager pour se débarrasser de sa traller aux mois les plus chauds .Nous étions nombreux et bruyants. Quoi de plus beau pour nous autres que de pouvoir s’épivarder dans la campagne environnante.Souvent au retour nous omettions de dire qui nous avions rencontrer lors de ces péripéties au bord du fleuve ou des champs de petites fraises.J’ai aussi de belles photographies de la famille de mon père en piques-niques dans les années 1900.Ces gens prenaient vraiment leurs aises devant le photographe pour illustrer la circonstance.
Tiens, tiens, tiens, chère Vous, vous avez donc vécu des pique-niques un brin osés alors !
Conservez précieusement les belles photos de famille de votre père en pique-nique. C’est un patrimoine. Et ce genre d’images ne fourmillent vraiment pas.