Un Teddy Bear gratuit !
Voilà qu’une compagnie ontarienne fait du racolage. Faites-vous vendeur pour cette compagnie; en retour, elle vous enverra gratuitement un Teddy Bear.
Voyez l’annonce dans Le Soleil du 5 décembre 1908 :
Gratis — Teddy Bear — Gratis
Voici un vrai Teddy Bear importé en poil brun. Sa tête, ses bras et ses pattes sont articulés sur son corps pour qu’ils puissent être mis dans toutes les positions et c’est drôle de lui voir branler la tête et l’entendre ronronner quand on le frappe sur l’estomac.
Teddy fait fureur dans les villes. Les enfants l’emportent à l’école et même les demoiselles âgées le portent avec elles quand elles vont prendre une marche ou en voiture ou au théâtre.
Le plus coûteux Teddy se vend $25.00. Nous avons choisi celui-ci pour vous à cause de sa dimension, sa tête, ses bras, et ses jambes articulées, son joli ronflage et sa belle couleur.
Tous les garçonnets et fillettes veulent un Teddy Bear et vous pouvez leur en procurer un très facilement. Envoyez-nous tout simplement votre nom et votre adresse et nous vous ferons parvenir par la poste (franco) seulement six de nos gravures en couleurs de 18 X 20 pouces, que vous vendrez très facilement à 25 cents chacune.
Ces gravures sont en 10 couleurs et sont des reproductions de quelques-uns des tableaux des maîtres. On peut les encadrer. Aussitôt que vous aurez vendu les gravures, envoyez-nous l’argent ($1.50) et vous recevrez au plus tôt le Teddy Bear tel que décrit plus haut. Écrivez aujourd’hui. Adresse : The Mutual Credit Co., Dept 49, Toronto, Ont.
Mais d’où vient donc cette popularité du Teddy Bear ? En 1973, à l’occasion du premier grand colloque d’ethnozoologie sur le thème L’homme et l’animal, tenu à l’Institut international d’ethnosciences de Paris, Paul-Henry Plantain, de l’Association des Journalistes et Écrivains pour la Protection de la Nature et de l’Environnement, prononce une conférence sur «Les relations de l’enfant et de l’ours en peluche». Voici ce qu’il écrit à ce sujet :
L’apparition de l’ours en peluche est un phénomène récent. On raconte qu’au début du siècle, le président Théodore Roosevelt, participant à une chasse à l’ours, eut pitié d’un ourson venu se réfugier près de lui et se coucher à ses pieds. Véridique et enjolivée, cette attendrissante histoire fit un grand bruit aux États-Unis. L’imagerie populaire s’en empara; on édita des cartes postales représentant la scène et un commerçant avisé, un certain Morris Michton qui dirigeait une fabrique de jouets se mit à confectionner des ours en peluche qui se répandirent rapidement sur le marché sous le nom de teddy bear, l’ours de Théodore. Tous les petits américains eurent bientôt leur ours en peluche. La mode traversa l’Atlantique, puis d’Angleterre, gagna les pays du Commonwealth jusqu’en Australie.
La rencontre du président Roosevelt et d’un ourson eut lieu en 1903.
Source de l’illustration ci-bas : Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Montréal, Collection Famille Cartier-Richard, cote P62, D308. Photographie prise vers 1920.
Assez étonnant : 25$ en 1908. Le calculateur d’inflation sur le site de la Banque du Canada ne commence qu’en 1914. Ainsi, la valeur de 2011 pour « le plus coûteux des Teddy » s’établit à $495.08. Je ne sais pas quel est le taux d’inflation de 1908 à 1914 mais disons que le Teddy en question vaudrait aujourd’hui $500. Il fallait vraiment avoir les moyens à l’époque pour se le payer. Disons qu’il n’y avait pas alors de Teddy » made in China, Cambodia, Vietnam, Sri Lanka, etc.
Alors, mon cher Normand, vous n’auriez pas pu alors, ni moi d’ailleurs, avoir un Teddy Bear à chouchouter.