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Le chapeau de paille (première partie)

Nous avons apporté de France la coutume de porter le chapeau de paille en été. Même le cheval, après sa venue, portait le chapeau de paille, percé de deux trous pour laisser passer les oreilles. Et les chapeaux de paille étaient faits maison ou achetés à bons prix sur les marchés publics, car un bon chapeau demande du temps et du soin à fabriquer.

Mais il faut reconnaître que les chapeaux de paille fabriqués à Livourne, en Italie, sont les plus réputés d’Occident. Un membre de la Société d’agriculture de Québec présente en 1828 une Note sur la manière de faire des chapeaux de paille semblables à ceux de Livourne. La Gazette des campagnes reprendra intégralement cette «Note» le 6 septembre 1883. J’extrais ce texte de mon ouvrage Les Quatre Saisons dans la vallée du Saint-Laurent (Éditions du Boréal, 1996, p. 418)

Ces chapeaux de Livourne (Leghorn) qui sont si beaux, si forts, si durables, qui se vendent de dix piastres à cent piastres, et que tant de dames portent sur leurs têtes, ne diffèrent de nos chapeaux de paille que dans la qualité de la paille, (ce qui dépend de la manière de la cultiver et préparer) et dans la manière de la tresser et coudre. Ils sont de «paille de bled», comme les nôtres, et chacun peut en avoir tant qu’il en voudra. Le bled qui fournit la paille «la plus blanche», et la plus difficile à casser, est le meilleur. Mais la paille dont nous nous servons est coupée lorsque le bled est «mur». Celle des chapeaux de Livourne est coupée quand le bled est «vert», c’est-à-dire, lorsque le bled est en fleur, lorsque la tige qui porte l’épi est suffisamment dure pour que le bout d’en bas, qui s’arrache avec l’épi, soit ferme de manière à ne pas s’écraser plus facilement que le haut. Les Italiens ont eu l’esprit de se servir de leur paille lorsqu’elle est jeune, souple et forte; nous nous en servons lorsqu’elle est roide et cassante par l’âge…

Ébouillanter la paille. On met dans une grande cuve ou autre vaisseau net, autant de poignées de la paille «verte» et attachée comme il est dit ci-dessus, que la cuve peut tenir; on verse dessus, à les couvrir entièrement, de l’eau «bouillante», bien nette, et on en retire les poignées attachées, dans une dizaine de minutes, pour les porter aussitôt à l’endroit où on veut les faire blanchir. À chaque cuvée, il faut se servir d’eau nette: et il faut ébouillanter la paille en entier, comme elle a été coupée.

Faire blanchir la paille. On étend les poignées sur l’herbe rase, une prairie ou verger fauché, par exemple. On l’étend bien claire, et elle peut y rester sept à huit jours, en la revirant chaque jour, jusqu’à ce qu’elle soit d’une belle couleur. On la ramasse par un tems sec; on l’attache par poignées ou petites gerbes, pour être serrée dans un endroit bien sec et propre, pour s’en servir au besoin.

Trier la paille. On la trie à loisir comme on trie la paille ordinaire pour les chapeaux. Il n’y a que la partie entre l’épi et le joint le plus proche, qui serve.  n l’assortit ensuite, pour être tressée lorsqu’on en a le tems.

Tresser et coudre. La tresse des chapeaux de Livourne ne diffère pas beaucoup de celle de nos chapeaux de paille. La couture est différente, en ce que les tresses des nôtres dépassent l’une sur l’autre, tandis que celles de Livourne sont comme si elles étaient collées l’une contre l’autre. On dirait qu’elles sont toutes d’un morceau.

 

La gravure d’Edmond-J. Massicotte est parue dans l’Almanach du peuple.

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