Tant de mascarades !
Je vous le disais hier, un des grands bonheurs de l’hiver, ce sont les mascarades. Partout présentes. À noter qu’on dit toujours un patinoir à l’époque.
Voyons-en quelques-unes hors des villes de Montréal et de Québec.
À Valleyfield d’abord, on n’attend même pas les Rois pour commencer les mascarades. La Patrie du 17 décembre 1898 annonce : À Valleyfield, le patinoir ouvre le mercredi 14 décembre. Il y aura là une grande mascarade la veille de Noël.
À Rivière-du-Loup, en voici une, le 6 janvier. Le journal de l’endroit, Le Saint-Laurent, présente un court texte à ce sujet le 7 janvier 1905. Malgré la température froide de jeudi [6 janvier], près de 300 personnes ont assisté à la mascarade, laquelle a été un véritable succès sous tous les rapports. Le corps de musique nous a égayé par plusieurs jolis morceaux. Les prix ont été décernés à Mlle Eva St-Hilaire pour le plus beau costume de dame, à M. Léo Girard pour le plus beau costume de monsieur et à M. Léon Lindsay pour le costume le plus comique. Au cours des semaines qui suivent, les mascarades ne cessent de succéder à Rivière-du-Loup, qui semble être en 1905 le pays des mascarades hivernales.
Trois-Rivières aime aussi les mascarades. Le Trifluvien du 17 janvier 1902 annonce : Il y aura, mercredi le 22 courant, un grand Carnaval avec concert-promenade au Patinoir Laviolette. $50 à gagner en divers prix pour les plus jolis costumes. Le programme musical est magnifique. Admissions : Spectateurs, 15 cts. Étrangers costumés, 25 cts. Abonnés costumés, gratis. Tous les peuples du globe seront représentés à ce Carnaval.
Les mascarades n’ont de cesse. À Sorel maintenant, La Patrie du 20 janvier 1899 rend compte de la mascarade tenue trois jours plus tôt. Il y a eu une grande mascarade au patinoir St-Laurent, mardi soir. Les spectateurs étaient assez nombreux et sur la glace figuraient une cinquantaine de patineurs costumés. Le patinoir était éclairé par une profusion de lanternes chinoises. À la prochaine mascarade qui aura lieu dans quelques semaines, on dit que le patinoir sera éclairé à la lumière électrique.
Retour à Rivière-du-Loup qui, selon Le Saint-Laurent du 10 février 1905, en a tenu une nouvelle, trois jours plus tôt. À la mascarade de mardi soir, les prix ont été décernés pour le plus beau costume de dame, La Nuit, à Miss May Garwood, le plus beau costume de monsieur, représentant le Sweet Caporal, à M. John Smith, le plus comique à M. Edgar Levasseur.
Et le journal ajoute : Les organisateurs ne peuvent que se féliciter du succès qu’a obtenu la mascarade de mardi dernier au patinoir de la Rivière du Loup. Seul le mot kaléidoscope peut faire comprendre le spectacle qu’offraient les patineurs pêle-mêle sur la glace, et la variété des costumes était tout simplement féerique. Il y avait cependant un personnage qui était reconnaissable entre tous, c’était la Sweet Caporal girl en uniforme de Hussard. Elle rappelait la fameuse affiche avec son passage reproduit de la grande autorité médicale, le London Lancet, recommandant cette cigarette comme la forme la plus pure sous laquelle le tabac peut être fumé.
Tiens à Rimouski. Il y aura mascarade au rond à patiner Dion jeudi prochain [23 février], selon Le Progrès du Golfe du 17 février 1905.
Et les Lévisiens n’ont qu’à bien se tenir, selon le Quotidien de l’endroit du 19 février 1895. On annonce pour lundi prochain [lundi gras, le 26] une grande mascarade au patinoir du Lévis Snow Shoe Club situé près de l’église méthodiste de cette ville. On compte sur un grand concours de patineurs costumés ce soir-là. Plusieurs jeunes filles et jeunes gens se proposent de rivaliser soit en parure soit en originalité. Tous les patineurs devront être costumés. Il y aura musique par la fanfare de Lévis. La mascarade commencera à 8 hrs. Qu’on se le dise.
Vive les mascarades en ce temps d’hiver !
Faudrait-il se costumer en ce mois de février pour nous aider à traverser la grisaille ou le temps en dents de scie que nous subissons ? Peut-être que ça égayerait les visages. Je ne connnaissais pas cette coutume de la masacarade sur le patinoire. Faudra que j’en parle à maman, si elle s’en souvient. Elle est arrivée à Mtl à 20 ans, en 1932. Cette coutume s’est arrêtée vers quelle année Jean ? Bonne journée !
Bonne question, Nicole. J’ignore quand ces mascarades urbaines ou villageoises se sont terminées. Vous savez, j’ai fait l’histoire du présent Carnaval de Québec (http://multim.com//titre/?ID=126). Or, au cours des premières années de l’événement, à partir de 1955, les mascarades au Colisée de Québec connaissaient un succès fou. Dans mon livre, on voit de nombreuses belles photographies de ces fêtes joyeuses, provenant des bureaux du Carnaval de Québec. Bientôt, vers 1963 ou 1964, on se dit «Tiens donc, les mascarades n’apparaissent plus dans la programmation du Carnaval.» Et cela se fait sans bruit, sans même que personne ne le remarque.
Au début des années 2000, travaillant à la recherche en vue de ce livre, j’ai demandé au premier employé du Carnaval, Pierre Tremblay, pourquoi les mascarades avaient été abolies. Il m’a répondu qu’après quelques années, les organisateurs voyaient que les mascarades étaient de moins en moins courues, comme passées de mode. «On aurait dit que les gens n’aimaient plus se costumer.»
Tu pourrais pratiquement reformuler le titre : « Temps de mascarade » !
Merci, Normand. Mais j’aime bien celui qui est là.
Fichtre, le London lancet ? et qui recommande une cigarette! sûrement le fameux ‘ Lancet ‘ toujours publié aujourd hui, mais aux opinions sûrement plus… réservé quant aux effets du tabac.
Ces mascarades semblent s’ apparenter au phénomène toujours bien connu des ‘ modes ‘ : tant de fois répétées et tranquillement éteintes.
Sauf qu aujourd hui, une mode dure si peu de temps!
N empêche que c était une bien-bien belle manière de passer l hiver. Amusant!
Absolument, chère Josee.