« La nuit de la Saint-Jean »
Que d’images magnifiques liées à la vie de la Nature !
Le vent envoûté cesse.
Le soleil du soir gorge la forêt.
Sous la terre, il y a de longues galeries chaudes,
où vivent les renards argentés.
Ils dressent leurs museaux, leurs yeux brillent d’une lueur jaune.
Dehors appelle le coucou.
De la mousse surgit un insecte tacheté.
Sous la mousse fulgure de vertes étincelles.
Des sources neuves jaillissent du sol,
en des lieux d’ordinaire secs.
Les nymphes sont proches, les nymphes sont proches.
Dans les couloirs de la forêt errent des bêtes hérissées.
Le noir forgeron frappe la lune de son marteau.
La forêt cesse en mille échos.
Au centre du ravin croît un feu blanc.
Il est là, brillant, translucide et pur.
Les renards s’assoient sur des souches, et ce sont des dames
qui s’éventent à l’aide d’une fougère, qui n’est plus fougère.
Le coucou agite ses ailes, et c’est une chouette.
La face de tous se modifie comme le cri.
Seuls les hannetons tachetés se cachent.
Je t’ai suivi, mon beau chevreuil,
tu as tourné vers moi ton grand œil doré,
et tu t’es approché.
Derrière la sapinière, le soleil commence à briller.
Nulle trace dans l’herbe couverte de rosée.
Tout est silencieux et fort clair.
Sous la terre, il y a de longues galeries chaudes
où respirent les renards endormis,
la queue sur les yeux. Les insectes sont morts peut-être,
dégringolés des branches.
Au cœur du ravin embaume un buisson de roses.
Quelque part retentit la voix lasse du coucou.
Personne ne répond.
Viens, endormons-nous dans la mousse. Ce sera un jour paisible,
une année paisible s’ouvre devant nous.
Svetlana Makarovic, « La nuit de la Saint-Jean », dans La poésie slovène contemporaine, anthologie, Paris, Éditions Seghers, 1971, p. 112s.
La photographie de Svetlana Makarovic apparaît sur le site suivant.
