Le sort d’enfants montréalais de familles éclopées
Certains enfants n’ont pas gagné à la loterie du début du 20e siècle.
Mardi après-midi, le maire suppléant, L’échevin Clearihoe, a décidé de renvoyer à l’asile de Montfort [un orphelinat agricole dans les Laurentides, au nord de Montréal] six petits garçons dont le séjour était terminé, mais qu’on ne pouvait laisser vagabonder sur les rues. D’après les fiches gardées par la ville, l’histoire de ces petits garçons est la suivante.
No 1 — Mère morte, père maladif, mais pouvant gagner $7 par semaine. Il doit sur cela payer $4.50 par semaine pour sa pension et nourrir quatre autres enfants.
No 2 — Mère morte depuis huit ans, père disparu depuis deux ans, alors qu’il souffrait d’une maladie de cœur, on le croit mort.
No 3 — Mère morte depuis 3 ans, père vagabond, parti le printemps dernier sans dire où il allait, on le croit faible d’esprit.
No 4 — Père et mère habitués de la prison et ivrognes.
No 5 — Mère morte, père ivrogne, sans domicile fixe, a deux filles dont l’une se meurt de phtisie.
No 6 — Père ivrogne, mère devenue folle à la suite de mauvais traitements.
Ces enfants resteront assez longtemps à Montfort pour y apprendre un métier. La ville entretient à cette institution une centaine d’enfants dont les parents sont pour la plupart ivrognes.
La Patrie (Montréal), 2 novembre 1905.
L’image de jeunes garçons de l’orphelinat de Montfort provient de l’hebdomadaire montréalais Le Monde illustré, édition du 8 août 1896.