Gagnons la cabane, bergère
Le journal La Patrie, qui aime glisser un poème dans son édition du samedi, y va, le 6 octobre 1900, de ce texte délicieux de Fabre d’Églantine.
L’Hospitalité
(Romance chantée)
Il pleut, il pleut, bergère;
Presse tes blancs moutons;
Allons sous ma chaumière;
Bergère, vite, allons !
J’entends sous le feuillage
L’eau qui tombe à grand bruit;
Voici, voici l’orage,
Voilà l’éclair qui luit !
Entends-tu le tonnerre ?
Il roule en approchant;
Prends un abri, bergère,
À ma droite en marchant;
Je vois notre cabane…
Et tiens, voici venir
Ma mère et ma sœur Anne,
Qui vont l’étable ouvrir.
Bonsoir, bonsoir, ma mère;
Ma sœur Anne, bonsoir;
J’amène ma bergère
Près de vous, pour ce soir.
Va te sécher, ma mie,
Auprès de mes tisons;
Sœur, faites-lui compagnie.
Entrez, petits moutons.
Soupons; prends cette chaise :
Tu seras près de moi;
Ce flambeau de mélèze
Brûlera devant toi;
Goûte à ce laitage;
Mais tu ne manges pas !
Tu te sens de l’orage;
Il a laissé tes pas.
Soignons bien, ô ma mère,
Son tant joli troupeau;
Donnez plus de litière
À son petit agneau.
Ne rougis pas bergère,
Ma mère et moi, demain,
Nous irons chez ton père
Lui demander ta main.
Fabre d’Églantine.
Philippe-François-Nazaire Fabre, dit Fabre d’Églantine (1750-1794), acteur, dramaturge, poète et homme politique originaire de Carcassonne, fut passé à la guillotine en 1794 lors de la Révolution française.
Le mouton ci-haut est une œuvre d’Hélène Audet, sculpteure d’art populaire de Baie-Saint-Paul.