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Botrel vient nous bercer pour Cartier

Portrait de Jacques Cartier par Dan Lailler, 1984

En 1900, l’auteur-compositeur-interprète breton Théodore Botrel (1868-1925) trouve inconcevable que rien ne rappelle la mémoire de Jacques Cartier à Saint-Malo, terre d’origine du navigateur. Le 14 avril 1903, le voici à Montréal, avec son épouse, pour une tournée de concerts dans neuf villes québécoises, et un dernier à Ottawa. Le chanteur espère lever la somme nécessaire à l’érection d’un monument au Malouin.

De ce côté-ci de l’Atlantique, comme en France sans doute d’ailleurs, Botrel, nostalgique, chantant le charme de son pays breton, est très aimé. On le fredonne dans les séminaires, les congrégations religieuses, chez les enseignants et même les membres du gouvernement. Dans les journaux québécois, on se réjouit de sa venue et on parle de lui comme du poète chrétien et du barde. Il jouera donc sur du velours.

Partout, Botrel, revêtu du bargou-braz, le costume breton qui l’identifiera à jamais, et son épouse «chanteront les refrains populaires qui ont rendu son nom célèbre dans la vieille Armorique et dans la France entière. Chansons de chez nous, Chansons en sabots, Chansons en dentelles». Dès le premier spectacle, à Montréal, le 17 avril, il frappe fort. Le journaliste de La Presse en est tout remué. Vous est-il arrivé quelquefois de vous sentir envahi d’une sensation de tristesse vague, indéfinissable, comme un regret, une nostalgie de l’antan, en entendant bourdonner au fond de votre mémoire le lointain écho d’une vieille chanson entendue dans l’enfance, oubliée depuis, et qui revient soudain, sans raison, évoquant un monde de souvenirs doux qui vous laissent en mélancolie pendant tout un jour? Telle est l’impression qui nous est restée de l’inoubliable soirée que nous avons passée en compagnie de Botrel au Monument National, hier.

Le concert de Québec sera sous le patronage de l’archevêque Louis-Nazaire Bégin. Le 28 avril, le correspondant de La Presse dans la capitale prévient la population que Botrel et son épouse arriveront le lendemain soir, à sept heures, à la gare du Pacifique Canadien. Il souhaite qu’on se rende les accueillir et qu’on participe au défilé qui les mènera jusqu’à leur hôtel, le Château Frontenac. Le comité d’organisation, écrit le journaliste, espère que tous les Canadiens français de Québec iront acclamer Botrel et sa compagne. Cette manifestation aura vraiment un caractère patriotique, surtout parce que M. Botrel fait cette tournée dans la Nouvelle-France pour recueillir les fonds nécessaires à l’érection d’un monument au découvreur du Canada, Jacques Cartier. Le comité espère que les marchands voudront bien fermer leurs magasins à 6 heures, demain soir, afin de permettre à leurs employés de prendre part à la démonstration.

Botrel, revêtu du bargou-braz, apparaissant sur le livret du cd (# 392) Théodore Botrel chanté par René Jacq, étiquette Arfolk, Distribution Breizh.

Botrel et son épouse se produisent au Manège militaire, le 30 avril. Bien sûr, c’est l’acclamation. Et Le Soleil d’écrire le lendemain : Après le concert, la foule est allée reconduire M. et Madame Botrel jusqu’au Château Frontenac. Les étudiants en tête ont chanté des refrains patriotiques, voire même des chansons de M. Botrel, le héros du jour.

Le 27 mai 1903, le couple fait ses adieux et s’embarque pour la France. Botrel a réussi son pari d’amasser l’argent voulu pour Cartier tout en nous berçant. Le 23 juillet 1905, lors de la cérémonie d’inauguration du monument, à Saint-Malo, Botrel y dira quelques-uns de ses poèmes. À Québec, on désirera posséder une copie fidèle de cette statue du navigateur. Et, le 17 octobre 1926, à l’angle des rues Saint-Joseph et de la Couronne, dans le faubourg Saint-Roch, on inaugurera la réplique de ce bronze de Saint-Malo.

 

Des centaines de chansons qu’a composées Théodore Botrel, La Paimpolaise, est sans doute la plus connue.

 

Ci-haut, le portrait de Jacques Cartier par Dan Lailler, 1984.
Voir la page personnelle de Dan Lailler

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