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Le passage de Théodore Botrel émeut

Botrel PinsonneaultAu printemps de 1903, le barde breton Théodore Botrel, étonné de découvrir que le navigateur Jacques Cartier n’a pas de monument à Saint-Malo, traverse avec son épouse pour donner des concerts dans plusieurs localités du nord-est de l’Amérique du Nord, histoire de lever des fonds.

Le couple reprend ses chansons avec lesquelles les mères berçaient leurs enfants et sa tournée connaît beaucoup de succès. Certains, à l’âme de poète, prennent la plume. Ainsi en est-il de W. Poitras, de Salaberry-de-Valleyfield. Son texte paraît dans La Patrie du 25 mai 1903.

 

 

À Théodore Botrel

Tes chants ont […] nos vallons et nos grèves,

O barde qui soupire en un rythme, si pur,

Que ravis de t’entendre, envahis par tes rêves,

Nous aimons la Bretagne et ton beau ciel d’azur.

 

Ses landes, ses menhirs pleins d’antiques mystères,

Sa plage légendaire, et ses monts enchantés,

Ses héros de renom et ses hardis corsaires,

Éveillent dans nos cœurs des gloires, des fiertés.

 

C’est que, ô barde aimé ! dans leur aile bretonne,

Les brises ont porté des grands noms sur nos flots…

Et le bleu St-Laurent, par un beau soir d’automne,

En immortalisa ses plus touchants échos.

 

Jamais, jusques alors, nos forêts séculaires

N’avaient, devant la croix, penché leur front altier;

Quand, au nom de la France, aux ombres tutélaires,

Elle tendit les bras en bénissant Cartier.

 

Cartier… à ce nom seul, le Canadien tressaille !

La France, sur nos toits, voit flotter son drapeau !

Et bien qu’un roi, aux plaisirs de Versailles,

L’ait un jour sacrifié comme un vil oripeau.

 

Après cent quarante ans, narguant la perfidie,

Tu le vois rayonner, fort contre tout affront !

Le sang de l’Armorique et de la Normandie

Coule encor dans sa veine et brille sur son front.

 

Messager d’outre-mer — aux champs du Nouveau-Monde,

Tu retrouves chez lui, le culte des aïeux;

Il est resté français !… La foi vive et féconde,

Passe de père en fils, sous le regard des cieux.

 

C’est donc un frère, ô barde ! un héritier fidèle

De tout ce que ta lyre aime et chante là-bas…

Aux bords du St-Laurent : c’est la France nouvelle

Que tu sens, dans la paix, tressaillir sous tes pas !

 

Sois donc le bienvenu ! Chante !… en son âme, versa

Le charme harmonieux dont tes vers sont remplis !

Tout un peuple t’écoute, et ta chanson le berce

Sous l’étendard anglais ouvrant ses larges plis…

 

W. Poitras

17 mai 1903.

 

L’illustration est parue dans Chansons de Botrel pour l’école et le foyer (Montréal, Éditions Beauchemin, 1931, 1958).

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