Le décès d’un centenaire à Saint-Césaire nous permet de savoir qu’il s’est trouvé là un personnage fort coloré
Voici le témoignage de monsieur Gagné. Le texte provient du correspondant de La Patrie dans ce village.
Notre village vient de perdre un centenaire, M. Antoine Gagné dit Bellavance, qui, le 11 décembre dernier, entrait dans sa 105e année.
Le vénérable vieillard est décédé, hier après-midi, chez sa fille, Mme veuve Pierre Seney, une septuagénaire, avec qui il demeurait depuis plusieurs années.
En septembre 1906, M. Antoine Gagné racontait lui-même à un reporter de La Patrie tous les détails de sa longue existence qui n’est point exempte d’aventures intéressantes.
À l’âge de huit ans, Antoine Gagné arrivait à l’endroit où se trouve maintenant Saint-Césaire, et qui était alors un bois. En 1837, il prit part à l’insurrection [des Patriotes]. Il était alors âgé de 35 ans. Il a fait ensuite plusieurs voyages aux États-Unis et au Manitoba. En septembre 1887, à l’âge de 85 ans, alors qu’il demeurait dans l’ouest, il avait construit de ses mains une cheminée.
Le centenaire a joui toute sa vie d’une excellente santé qu’il devait, croyait-il, à la stricte observation des quatre règles suivantes :
N’user de l’alcool que très modérément ;
Ne pas fumer ;
Se coucher de bonne heure et se lever tôt ;
Manger peu et le moins de viande possible.
M. Gagné, qui était doué d’une mémoire étonnante, se rappelait parfaitement de la guerre de 1812, À cette époque-là, disait-il, les sergents et les capitaines le faisaient venir auprès d’eux pour qu’il chantât des chansons. À 12 ans, il pouvait chanter une soixantaine de chansons dont les couplets se comptaient par trentaine.
Dans toute sa vie, il n’avait été malade qu’une fois : un petit refroidissement.
Saint-Hyacinthe fut le berceau de M. Gagné. La jolie ville de l’Yamaska n’était alors qu’un petit village que l’on appelait Maska.
À Saint-Césaire, le défunt s’occupa principalement de construction, de menuiserie, durant les loisirs que lui laissait la culture de la terre jusqu’à l’âge de 50 ans. Il alla ensuite retrouver ses enfants dans le Massachusetts où il demeura 22 ans. Puis, il passa au Manitoba d’où il revint en 1899.
Comme nous l’avons dit, M. Gagné demeurait chez sa fille, Mme veuve Pierre Seney, avec son petit-fils, cultivateur, son arrière-petit-fils et la fille de ce dernier.
Il s’était marié deux fois, la première fois avec une Irlandaise, Mary Ann Harris, et la deuxième fois, avec Marie Anne Clément. Il a eu 16 enfants.
Le centenaire était, naturellement, connu dans toute la région et sa mort cause ici un deuil général.
La Patrie (Montréal), 14 mars 1908.
Pour connaître davantage la vie d’Antoine Gagné, voici une porte.
