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Le cousinage et ses tentations

jeune couple

Après notre mère et nos sœurs, les premières filles que nous avons connues, garçons, furent souvent nos cousines. Moi, je serais bien allé au bout du monde avec l’une d’elles.

Voici une de ces histoires, non signée, de cousin-cousine, histoire de premiers émois.

Ma cousine passait la vacance chez nous.

Elle avait douze ans, moi treize; mais mon cœur en amour était bien plus jeune que le sien.

Elle avait pour dents deux rangées de perles, pour chevelure une broussaille de soleil, et, quand elle souriait au miroir de la source, je doutais si c’était une nymphe ou ma cousine qui se mirait.

Elle était gaie et folle

Comme le papillon,

Comme la luciole,

Comme l’aile qui vole

Sur l’herbe du sillon.

Elle avait des caprices charmants.

Elle aurait voulu trouver des nids où il n’y avait pas d’oiseaux, et vous aurait tout bonnement demander de lui donner une étoile pour mettre à ses cheveux.

Que j’aimais la voir bondir dans le bosquet, le jupon serré sur la hanche, la tresse au vent, l’œil effaré par la course !

Un jour, nous étions allés ensemble cueillir des fraises…..

Tout à coup, elle disparut…..

J’eus beau fouillé chaque taillis…. elle était introuvable.

Je commençais à m’inquiéter de son absence.

Comme je la demandais à tous les échos, elle bondit tout à coup d’un buisson, riant comme une folle…..

Mais bientôt elle pâlit, se troubla et se mit à pleurer.

La pauvrette venait de perdre un de ses pendants d’oreille.

Nous nous mîmes à le chercher, à genoux dans l’herbe. C’est elle qui le trouva.

— Cousin, tu devrais bien me le mettre, dit-elle, en rougissant; et elle penchait vers moi son oreille rose.

Et moi tout tremblant je me mis à l’œuvre.

Pendant que j’étais à boucler le joyau, elle me tendait toujours la joue me regardant avec un fin sourire.

Et quand, ma besogne faite, je lui dis : Allez ça y est, elle soupira, et je l’entendis qui dit :

— L’imbécile !

 

La Patrie (Montréal), 19 juillet 1883.

Tout en haut, l’image de ce jeune couple vers 1925 vient de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec dans le Vieux-Montréal, Collection Monique Mercure-Vézina, Photographies, cote : P157,S4,P219.

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