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En 1910, Montréal est d’une pauvreté culturelle navrante

montreal square victoria

Ainsi s’écrie un Anglophone de la métropole Et le quotidien La Patrie reprend son propos le 10 juin 1910.

Enfin ! un de nos concitoyens de langue anglaise vient d’élever la voix pour dénoncer le terre-à-terre de l’existence des Montréalais; l’impossibilité pour les masses de toute culture intellectuelle; le désintéressement regrettable des classes aisées pour les choses de l’esprit et l’absence dans la métropole commerciale de toute institution pouvant contribuer à instruire le peuple. […] Les paroles du savant professeur méritent d’être citées; nous les empruntons à la «Gazette» :

Montréal a un grand défaut. Comme le Canada, c’est un garçon qui a grandi trop vite. Il est temps qu’ils [les citoyens de Montréal] s’en aperçoivent.

Il ne faut pas qu’ils se contentent de progresser matériellement et il est temps qu’ils accordent plus d’attention aux choses plus élevées de la vie.

Examinons ce que Montréal n’a pas.

Il n’a pas de jardin zoologique ou botanique, pas de bibliothèques publiques adéquates, institutions indispensables à l’éducation de la jeunesse. Nous n’avons pas de musées de sculpture et de peinture que l’homme pauvre puisse visiter, afin de pouvoir, quelquefois, s’élever au-dessus de sa pénible tâche.

Montréal affame ses prophètes : c’est-à-dire ceux pouvant contribuer à l’avancement intellectuel du peuple.

Cette ville est moins avancée dans l’art de la musique qu’elle l’était il y a trente ans.

Les artistes, les poètes, les véritables hommes de lettres au-dessus du troupeau commun sont incapables de vivre à Montréal.

Aujourd’hui même, un grand virtuose, à la tête de sa profession, est obligé de vivre dans une seule chambre dans la rue Sherbrooke-Est.

 

Ces vérités n’avaient encore été dites que par des Montréalais de langue française, des Latins; il est bon qu’elles soient répétées par des Saxons.

La question des pavages et de trottoirs et la qualification foncière ont empêché Montréal de s’occuper de l’avancement intellectuel du peuple.

Quand on parlait musées, bibliothèques, jardins zoologiques, les échevins répondaient : nos lecteurs veulent des trottoirs et des rues, et les échevins, propriétaires représentant les intérêts fonciers, ajoutaient : nous ne payons pas de taxes pour acheter des livres, des bonhommes de marbre ou mis à l’huile sur de la toile.

Et voilà pourquoi Montréal est la ville où on ne voit aucune manifestation artistique, où les artistes, les littérateurs végètent et même crèvent de faim quand ils ne peuvent attraper «un job» du gouvernement ou d’un journal.

Aux appels des Canadiens-français, se joignent maintenant ceux des Canadiens-anglais : puisse cette entente cordiale porter ses fruits.

Un commentaire Publier un commentaire
  1. Jean Provencher #

    Au sujet de ce billet, un observateur montréalais m’écrit :

    Je note de cet extrait:

    « Il n’a pas de jardin zoologique ». 100 ans plus tard, en 2016, le zoo
    est vu comme une tare et est appelé à disparaître à mon avis.

    «pas de bibliothèques publiques adéquates ». C’était effectivement la
    grande ère de la démocratisation des bibliothèques publiques grâce à
    Carnegie (https://en.wikipedia.org/wiki/Carnegie_library)

    « Montréal affame ses prophètes : c’est-à-dire ceux pouvant contribuer
    à l’avancement intellectuel du peuple. ». En 2016, on le ressent encore
    parfois.

    « Les artistes, les poètes, les véritables hommes de lettres au-dessus
    du troupeau commun sont incapables de vivre à Montréal. » Avec la
    hausse du coût des logements, on approche de cela en 2016 aussi.

    « La question des pavages et de trottoirs et la qualification foncière
    ont empêché Montréal de s’occuper de l’avancement intellectuel du
    peuple. » En 2016, on passe encore beaucoup de temps à parler de pavage
    et de trottoir.

    7 juin 2016

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