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Faut-il être accueillant pour les immigrants ?

la halle de emigres a quebecÀ l’heure même où de grands groupes migrent sur terre, voyons ce qu’on pouvait écrire sur l’immigration au Québec voilà plus de 100 ans. Retour au journal Le Sorelois du 5 février 1889 sous le titre «L’Immigration française». Un texte non signé.

L’Immigration française a été appréciée de différentes façons dans notre pays. Comme c’est le cas pour beaucoup de choses, nous croyons qu’on en a dit trop de bien et trop de mal. Essayons d’étudier la question comme elle doit l’être et de prendre un juste milieu.

Après la guerre franco-prussienne [1870-1871], il nous est venu de mauvais éléments, c’est incontestable. Notre pays ne doit pas servir de lieu de refuge aux rebuts des nations. Mais ce malheur n’est pas à craindre. Les communards qui sont arrivés ici n’ont pas tardé à nous débarrasser de leur présence; ils ne pouvaient se plaire au milieu d’une population sincèrement chrétienne, laborieuse et économe, amie de la paix, ennemie convaincue du désordre et du vice.

Ils ont disparu sans laisser de trace.

Mais, nous dira-t-on, d’autres essais ont été faits; où sont les résultats ?

Ces résultats sont partout, d’un bout à l’autre du Canada. Ceux qui les ont provoqués n’en ont peut-être pas eu le mérite, ni revendiqué l’honneur auprès de ceux qui dirigent l’opinion publique. Ouvriers modestes, ils ont semé sans éclat, laissant aux autres les joies du succès et les bénéfices de la récolte.

Faut-il maintenant négliger ce mouvement à cause de quelques insuccès partiels ? Nous ne le croyons pas, nous sommes au contraire d’avis qu’on doit se hâter de profiter de ce qui se passe actuellement en Europe.

Là-bas, tous les pays et surtout ceux de langue française admettent plus que jamais que, pour leurs populations, trop à l’étroit, l’émigration est la seule planche de salut.

Les artisans, les cultivateurs, tous ceux qui vivent de leur travail ne sont pas les seuls Européens qui songent au départ.

Les bruits de guerre, le peu de stabilité de certains gouvernements, la difficulté de faire de bons placements, l’inquiétude au sujet de l’avenir de leur famille poussent les industriels, les capitalistes, les rentiers paisibles à chercher un pays où l’on puisse travailler et vivre en paix. […]

L’arrivée de ces étrangers est-elle un bien pour les pays qu’ils choisissent ? Ces éléments nouveaux et variés à l’infini sont-ils de nature à garantir la paix, à augmenter la prospérité publique ? Nous les souhaitons de tout cœur, sans trop oser l’espérer. Mais nous savons aussi que, si les bons colons sont une fortune pour les pays nouveaux, les mauvais sont un fléau, une véritable calamité. […]

Ne devons-nous pas, nous qui voyons avec bonheur l’arrivée de colons de langue française, ne devons-nous pas chercher à créer un mouvement d’immigration dont les résultats doivent être nécessairement avantageux autant pour nous que pour nos frères des vieux pays ?

Par l’envoi de notes, de bulletins périodiques, de brochures et de renseignements divers, nos amis éclairés de la colonisation devraient chercher à attirer sur notre pays l’attention des populations européennes. Mais ils ne chercheront pas à faire venir le plus de monde possible.

Tout en faisant connaître le Canada tel qu’il est, tout en énumérant les avantages qu’on y rencontre et les chances de succès que le pays offre aux immigrants, ils parleront aussi des difficultés à vaincre et des obstacles à surmonter.

Aux hommes sans énergie, aux aventuriers qui rêvent une vie oisive, sans luttes et sans fatigues, ils diront au détour : «Ne venez pas ici. »

 

L’illustration des halles des immigrés à Québec provient de L’Opinion publique du 24 juillet 1873. On la retrouve sur le site de la Bibliothèque et Archives nationales du Québec au descripteur «Émigration et immigration».

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