La chanson «Un Canadien errant» aurait-elle dix couplets ?
Voilà ce que laisse pourtant entendre le bi-hebdomadaire La Gazette de Joliette du 18 septembre 1883. Sans plus de commentaires, l’article signé J. A. Chagnon s’ouvre simplement sur ces mots : Le Travailleur de Worcester [Massachusetts], dans son numéro du 28 août dernier, publiait les vers suivants :
I
Un Canadien errant,
Regrettant ses foyers,
Parcourait en pleurant,
Des pays étrangers.
II
Un jour triste et pensif,
Assis au bord des flots,
Au courant fugitif,
Il adressait ces mots :
III
«Si tu vois mon pays,
Terre de mes aïeux,
Va dire à mes amis
Que je me souviens d’eux.
IV
Plongé dans les douleurs,
Loin de mes chers parents,
Je coule dans les pleurs,
D’infortunés moments.
V
«Puis-je vivre éloigné
Des amis de mon cœur !
Non, je te reverrai,
O terre de bonheur !
VI
«Plus que jamais j’ai foi,
Au pays généreux
Dont une juste loi
M’offre un retour heureux.»
VII
Aussitôt animé
Du plus noble dessein,
De son pays aimé
Il reprend le chemin.
VIII
Dans nos cantons si beaux,
Dans nos vastes forêts,
Bravant les durs travaux,
Il se fixe à jamais.
IX
Et là souvent, le soir,
Sa voix, comme aux beaux jours,
Redit ce chant d’espoir,
Chant d’espoir et d’amour :
X
«Oui, dans mon cher pays,
«J’ai voulu revenir,
«Au milieu des amis,
«Pour y vivre et mourir.»
Il faut se demander, bien sûr, si quelqu’un ici ne s’est pas permis d’ajouter quelques couplets à la version première d’Antoine Gérin-Lajoie, et de la modifier à l’occasion.
Tout en haut, une création magnifique du sculpteur Édouard McCann, de Québec, illustrant une scène en forêt que lui-même appelle Équarissage du bois.
Puis, dans les journaux d’hier, nous tentons de suivre à la trace cette chanson Un Canadien errant.
Un peu étrange cette finale édulcorée pour lui donner un « happy ending », ce qui n’était pas du tout l’habitude de l’époque où il était(presque toujours !) de bon ton que les événements tristes le demeurent. Sur tous les sites où j’ai fait recherche, après le couplet III, la finale se présente ainsi :
« Ô jours si pleins d’appas
Vous êtes disparus,
Et ma patrie, hélas!
Je ne la verrai plus!
« Non, mais en expirant,
Ô mon cher Canada!
Mon regard languissant
Vers toi se portera… »
Ô, merci beaucoup, chère Vous. Il me semblait bien aussi que cette version avait été trafiquée. Il y avait anguille.