«Un centenaire canadien»
Les familles nombreuses dont se glorifie le Canada français ne sont pas du tout un obstacle à ce que certains de leurs membres vivent très vieux.
En voici un exemple entre mille.
M. Michel Soucy est né à Saint-André de Kamouraska, province de Québec, en l’an de grâce 1794, c’est-à-dire trente-quatre ans après la cession du Canada à l’Angleterre, ce qui datera de cent cinquante ans bientôt.
En 1821, il avait alors vingt-sept ans, il épousa Mlle Dumond, de la même paroisse, et s’en alla s’établir à Fraserville, Rivière-du-Loup en bas.
Il y demeure depuis soixante-quinze ans. Son épouse est morte il y a une dizaine d’années passées.
Le 27 mai prochain, M. Soucy aura cent deux ans et il est encore en pleine santé, eu égard à son âge plus que patriarcal.
Or, le printemps dernier, quand le vénérable vieillard a eu son siècle et un an, les membres de sa famille et ses amis ont voulu célébrer avec éclat ce rare anniversaire.
Il y eut fête générale à Fraserville, et le respectable patriarche, qui est un ancien cultivateur de la vieille et forte race, a voulu remettre la main aux mancherons de la charrue défricheuse, qu’il a si longtemps et si vaillamment tenus.
C’est cette jolie scène que retrace notre gravure. Les rênes sont tenues par M. L.-M. Soucy, de la rue Richmond, à Montréal, petit-fils du vieillard. Trois filles de M. Soucy vivent aussi à Montréal.
Source : Le Monde illustré, 14 décembre 1895.
L’illustration est, bien sûr, celle décrite ici, parue dans Le Monde illustré de ce jour. On la retrouve sur le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, au descripteur «Fraserville (Québec)».