La vieille fille

Bien rares sont les sociétés, je crois, qui ont promu le célibat. Battre le tambour pour cet état de vie serait se condamner à disparaître. Aussi, dans la presse de 1900, lorsque l’occasion s’y prête d’une façon ou d’une autre, on choisit plutôt de se moquer du vieux garçon et de la vieille fille.

L’Étoile du Nord du 11 novembre 1886 nous dit «à quels symptômes» reconnaître qu’une dame doit coiffer sainte Catherine.

Ces symptômes sont aussi nombreux que variés.

Comme leur nomenclature serait un peu fastidieuse, je ne vous en signalerai que quelques-uns.

Une demoiselle est prédestinée à devenir vieille fille :

Lorsqu’elle commence à dire qu’elle a refusé un bon parti;
Lorsqu’elle commence à dire que les hommes sont des êtres exécrables et qu’elle ne voudrait pas s’embarrasser d’un mari pour tout l’or du monde;
Lorsqu’elle commence à se faire suivre par un petit chien;
Lorsqu’elle commence à tenir un chat à côté d’elle pendant ses repas pour lui donner du lait sucré;
Lorsqu’elle commence à aller à l’église avec un livre de prières du format gros octavo, 600 pages;
Lorsqu’elle commence à avoir honte d’ôter son chapeau devant des messieurs sous prétexte qu’elle n’a pas de garniture de cheveux;
Lorsqu’elle commence à parler à quelqu’un en se tenant les doigts devant la bouche, comme si elle craignait de laisser voir des lacunes dans son râtelier;
Lorsqu’elle commence à se plaindre de son miroir et dire qu’il est affreux;
Lorsqu’elle commence à parler de courants d’air et à fermer les interstices dans la porte et les fenêtres;
Lorsqu’elle commence à ne pas être satisfaite du portrait qu’a tiré son photographe;
Lorsqu’elle commence à dire que les messieurs ne font plus de visite le jour de l’an, etc., etc.

L’illustration est parue dans l’édition en langue anglaise The Old Maid [La Vieille, Fille] du livre d’Honoré de Balzac parue chez George Barrie & Son, à Philadelphie. On la retrouve dans la page Wikipédia consacrée à ce livre de Balzac.