L’infiniment grand, l’infiniment petit
Celui qui signe S. Beaudet, dans L’Écho des Bois-Francs du 3 octobre 1896, y va d’une réflexion-méditation sur le thème «L’homme est placé entre deux infinis».
Une infinité de choses sont au-dessus de l’homme. Voyez le soleil, cet astre qui, roulant sur nos têtes, nous éclaire et nous réchauffe; plus de cent cinquante millions de kilomètres le séparent de notre globe qui n’est qu’un pois près de lui.
Que nombreux sont les corps célestes ! seulement à l’œil n l’on peut en énumérer près de trois mille. Quelques-uns de ces astres sont tellement éloignés de nous que la science se déclare impuissante à en évaluer la distance. Qu’est la terre par rapport à toutes ces masses énormes, elle qui ne mesure que vingt cinq mille milles de contour ? Qu’est l’homme, sinon un grain de moutarde que le moindre zéphyr ou la moindre vibration agite ?
L’infini est encore au-dessous du mortel. Prenez un ciron; cet arachnide, comme presque tous ceux de son espèce, est microscopique; il est si petit que la tête, le thorax et l’abdomen se confondent; sa respiration est purement cutanée; cette espèce est très nombreuse.
Examinez au microscope une goutte d’eau et vous y découvrirez un océan où nagent une multitude d’être vivants. Supposez un instrument plus puissant et vous verrez derrière ce monde déjà infiniment petit un monde plus petit encore.
Il est donc vrai de dire que l’homme est placé entre deux infinis. Or il résulte de cet état que les sens de celui-ci ne peuvent percevoir rien d’extrême : un grand bruit l’assourdit, un rayon d’une lumière trop vive l’éblouit, une chaleur et un froid extrêmes l’étouffent et le paralysent.