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Abandonné en naissant

J’évite de vous entretenir trop souvent du mauvais sort de beaucoup d’enfants en 1900, car ce site pourrait tourner en une continuelle lamentation. Mais, tout de même, voici le genre de propos que nous trouvons régulièrement. Celui-ci fait la une de La Patrie du 8 mai 1906.

Abandonné seul au milieu de la nuit sur les marches du perron d’une de nos institutions de charité, tel a été le sort d’un pauvre bébé qu’une mère coupable ou tout au moins sans cœur a voulu priver de ses caresses et éloigner comme une preuve de sa faiblesse.

Vers 11 heures, hier soir, un des résidents de la rue St-Mathieu, demeurant vis-à-vis la porte d’entrée du couvent des Sœurs Grises, remarqua une voiture de place qui venait de s’arrêter juste en face du perron. Intrigué par cette voiture s’arrêtant là à cette heure tardive, il s’arrêta un moment. Peu après, il vit sortir de la voiture une jeune femme, habillée tout en noir, portant dans ses bras un paquet assez volumineux. Rapidement, elle monta les degrés du perron, puis redescendit presqu’aussitôt les mains vides. Elle remonta en voiture et fouette cocher, elle disparut dans la direction de la rue Dorchester.

La scène avait été si rapide que notre homme avait eu à peine le temps de réfléchir qu’il entendit dans la direction du portic [sic] des sons comme ceux des vagissements d’un enfant. Il en avertit de suite la police.

Le sergent Carwich et le constable Logan se transportèrent sur les lieux et trouvèrent chaudement enveloppé un enfant de sexe masculin, paraissant âgé de trois semaines environ, fortement constitué et ne demandant qu’à vivre. Le petit être fut transporté au poste central et confié à Mme Lajeunesse qui en prendra soin en attendant la décision des autorités à son sujet.

* * *

Et le lendemain, 9 mai, toujours à la une de La Patrie, un autre histoire déchirante.

— Que m’apportez-vous là, questionnait curieusement le surintendant de l’Assistance publique à un homme connu qui arrivait hier matin au nouveau local de l’œuvre, 105, rue St-Hubert, portant avec précaution un paquet tout drôle enveloppé d’un vieux châle ?

— Vous allez voir, fit l’homme en souriant.

Et aussitôt émergea de la couverture la tête mignonne d’un tout petit enfant de trois jours au plus.

Oui, une mère indigne de ce nom avait commis le crime d’abandonner son enfant, et elle l’avait confié au perron d’une église. Le pauvret, outre ce vieux châle, ne portait qu’un misérable lange. La personne qui l’a recueilli a eu la bonne idée de le porter à l’Assistance Publique où le cher petit fut reçu avec tendresse par l’excellente surintendante de l’œuvre, Mlle Morache.

Les dames directrices de l’œuvre arrivèrent bientôt, apportant qui le petit linge, qui des chaussettes, qui une robe, une autre un châle bien chaud, l’autre une bouteille pourvue d’une «suce», de la poudre, des serviettes, enfin tout un petit trousseau. La toilette du mioche fut bientôt faite, et l’enfant est vraiment bien dans tout ce linge blanc que lui ont donné ces nouvelles mères.

Nous ne savons pas encore ce qui adviendra de l’enfant tombé inopinément dans le berceau de l’Assistance Publique, mais déjà bien des dévouements se sont penchés sur ce fragile bébé, bien des tendresses ont souri à sa grâce frêle — et disons-le — c’est avec un sentiment d’orgueil que des femmes admirables ont proclamé :

— Est-il assez beau «notre» garçon ?

— Puis il a si bonne envie de vivre !

Le Dr Laberge, le distingué médecin de la ville, directeur de l’Assistance Publique, s’est constitué le protecteur en titre du bébé. L’avenir de ce petit sera donc sauvegardé par le dévouement intelligent de ce vaillant protecteur.

À quand une histoire de nos enfants d’ici ? Qu’attend-t-on ?

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