Arrêtons de battre nos enfants
Le 5 mai 1904, le journal montréalais La Patrie y va d’un éditorial sur les coups que les enfants reçoivent de leurs parents.
Les mères de famille, ceux qui ont charge de l’éducation des jeunes enfants devraient toujours étudier avec le plus grand soin la manière de les traiter.
Que de parents, par exemple, donnent à leurs enfants en très bas âge des coups pour de petites fautes d’omission ou de commission.
En y réfléchissant, ils ne manqueraient pas de convenir que ces brutalités ne sont pas un moyen efficace de leur inspirer de bons sentiments.
Dans la plupart des cas, les jeunes enfants, qui commettent des offenses, le font par ignorance ou inadvertance.
Il a été porté à notre connaissance que des parents dépourvus de jugement allaient jusqu’à enfermer leurs enfants dans des endroits obscurs, à la noirceur, les privant même de nourriture pendant des heures et des heures. Effrayer ainsi un enfant est de la cruauté qui peut conduire aux plus graves conséquences.
La danse de St-Guy, les cauchemars la nuit, les troubles nerveux sont souvent le résultat de la frayeur qui a été inspirée aux enfants.
Ne frappez jamais vos enfants sur la tête. Le mécanisme de l’oreille est tellement compliqué que la moindre secousse peut conduire à la surdité.
L’appareil de l’ouïe est plus compliqué que celui d’une montre.
Dans certaines institutions, autrefois, et peut-être encore un peu aujourd’hui, l’on bat les enfants sur les mains.
Ce procédé est absolument indéfendable.
La main est, comme l’oreille, merveilleusement compliquée.
C’est une pièce de mécanisme délicat et sensitif à l’extrême.
La main sert à tant d’usages différents ! Jamais mécanisme humain, si parfait soit-il, n’a pu être comparé à l’appareil de la main.
Il est donc de la dernière imprudence de frapper les enfants à cette partie si précieuse de l’organisme.
Pour résumer en un mot la pensée des meilleurs éducateurs, posons en principe que les châtiments corporels ne doivent être employés que dans les cas exceptionnels.
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Et dans la même page, tout à côté, on trouve ce court article sur les ruelles, le terrain de jeu par excellence des enfants des quartiers populaires.
La belle saison nous est revenue pour tout de bon, et rien ou à peu près rien n’a encore été fait pour nettoyer les ruelles.
La plupart des ruelles sont encombrées de déchets qui se corrompent et empoisonnent l’atmosphère. Il n’est pas étrange vraiment que la mortalité — chez les enfants surtout — soit aussi considérable.
Nous sommes d’une négligence coupable pour tout ce qui a trait à la santé publique.
Le département de la salubrité ne pourrait-il pas faire preuve d’une peu plus d’activité ?
Il est urgent que les ruelles, les cours soient nettoyées sans retard.
Quand, mais quand donc s’attaquera-t-on à une grande histoire de nos enfants ?
Bouleversante cette parution du 5 mai 1904 et plus encore votre question qui est toujours d’actualité et à laquelle je tente de répondre chaque jour avec la tristesse au ventre car il y a tant d’indifférence.
Oui, qu’attend-on pour entreprendre une grande histoire de nos enfants, depuis les enfants de nos Autochtones avant l’arrivée des Européens jusqu’à ceux d’aujourd’hui ? Il y aurait là, il me semble, un bien important projet. Tant d’indifférence, comme vous dites si bien.
Faudra-t-il s’y mettre à plusieurs ? Et imaginer internet pour nous aider ?