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La page agricole

En 1900, quelques quotidiens québécois ont leur page agricole hebdomadaire. Habituellement le samedi. On y traite d’espèces animales et végétales, de cultures, bien sûr, de soins aux bêtes et quoi encore.

Dans sa page agricole du samedi 20 août 1904, par exemple, Le Canada répond aux questions des cultivateurs, traite de labours et de sarclages légers, de l’amélioration d’un pré marécageux, des punaises à chou et du trèfle comme nourriture pour les poules. Il reproduit aussi un article du chroniqueur agricole français A. Montoux, du Journal des campagnes, sur l’élevage du dindon.

 

Le dindon est l’un des hôtes les moins sympathiques de nos basses cours, Sa démarche quelque peu solennelle, sa physionomie niaisement orgueilleuse, son glouglou insipide justifient assez bien l’aphorisme populaire «orgueilleux et bête comme un dindon».

Il ne faudrait cependant pas croire que cet animal est tout à fait dépourvu d’intelligence; la finesse qu’il déploie parfois, dans certains actes de sa vie, s’oppose à ce qu’on en fasse le type de la bêtise animale, ainsi qu’on l’a proposé bien souvent.

Il est d’ailleurs sage de notre part d’être indulgent pour les bêtes. Si la fatuité du dindon nous paraît agaçante, c’est peut-être en raison de la prétention que nous avons d’établir une comparaison entre les actes des êtres qui nous entourent et ceux auxquels nous nous livrons !

Il est certain que le dindon qui fait la roue se moque un peu de ce que nous pouvons penser de lui, il ne cherche point à conquérir nos sympathies et nos suffrages, mais c’est pour lui la manière de faire sa cour à la dame de ses pensées.

Le dindon est plutôt un timide. Quoique mieux partagé que les autres oiseaux sous le rapport de la taille et de la force, il ne cherche point à dominer. Maintes fois, j’ai vu fuir des dindons devant un coq ou une pintade, refusant d’accepter le combat auquel ces oiseaux les défiaient. […]

Le dindon est originaire d’Amérique et des îles qui bordent le continent américain. C’est un rallié à la civilisation de date assez récente.

On le vit paraître, pour la première fois, en France, sous le règne de Charles IX, et pour son repas de noce en 1570. Son introduction en Angleterre remonte à l’année 1524, sous le règne d’Henri VIII. Rabelais a consacré quelques pages au dindon dans le IVe livre de Pantagruel, publié en 1553. […]

Par un contraste assez bizarre, les dindonneaux destinés, en grandissant, à devenir fort indifférents aux soins qu’ils recevront, manifestent une prédilection très marquée pour la nourriture qu’on leur distribue dans la main. Lorsqu’on leur donne la nourriture de cette manière, ils «piaulent» même quand ils ont de la pâtée à leur disposition et cela pour appeler la personne qui leur apporte leur repas et obtenir d’elle la faveur de manger dans sa main. […]

On peut commencer l’engraissement, si les sujets ont été bien nourris, vers l’âge de six à sept mois. Il faut restreindre leur parcours ordinaire, pour les habituer peu à peu à habiter constamment une petite cour ou un petit local de dimensions suffisantes pour qu’ils puissent y prendre de l’exercice.

Cet engraissement dure environ 45 jours. Pendant le premier mois, on se contentera de leur distribuer à satiété une ration alimentaire composée de graines et de patates, dans lesquelles on fera entrer une forte proportion  des farines et des pommes de terre. Pendant les quinze derniers jours, on les garde comme les poulets. Il faut bien se garder de placer les dindons à l’engrais dans un espace restreint où ils pourraient à peine bouger comme cela se fait pour les poulets.

Quelles que soient la quantité et la qualité de la nourriture distribuées, ils n’engraisseraient pas, ils maigriraient plutôt, on aurait fait des dépenses en pure perte.

Il ne faut jamais oublier que notre dindon est un oiseau à mœurs vagabonds et qu’il ne s’accommode pas d’un internement complet.

 

Ci-haut, ma mère, Claire Parent, fiancée, à quelques semaines de son mariage. Le petit bouquet qu’elle porte sous l’épaule gauche souligne d’ailleurs ses fiançailles. Elle a 20 ans. Mon père et elle se sont épousés le 28 octobre 1939 à Trois-Rivières. Ici, en visite dans sa parenté à Saint-Raymond de Portneuf, elle s’est sans doute proposée pour aller nourrir la basse-cour. Et je mettrais ma main au feu qu’elle a, pour ces oiseaux, de la nourriture dans son tablier. À Trois-Rivières, rue Cartier, plaçant des morceaux de pain rassis dans un petit sac de papier brun, elle nous envoyait régulièrement, nous fort jeunes, nourrir les poules des Larouche, des voisins tout près. Et on ne se faisait pas prier. Chère vie.

5 commentaires Publier un commentaire
  1. Avec la montée en puissance de l’agriculture urbaine et du mouvement locavore (ce désir de se nourrir localement), on assiste probablement en 2012 à une renaissance de l’agricole. Je ne serais pas surpris de revoir poindre dans nos médias de plus en plus de ce genre de contenu.

    30 août 2012
  2. Jean Provencher #

    Ô, ce serait super ! Et une autre source d’informations pour nous, urbains, qui avons franchement moins de liens avec l’agricole. Voyons voir, voyons voir. Moi, je l’espère alors. Merci, cher amour.

    30 août 2012
  3. Jean Provencher #

    Une amie qui est dans l’agriculture urbaine depuis un moment à Montréal m’écrit :

    Ton cher fils a parfaitement raison; la belle révolution de l’agriculture urbaine est vraiment en train de prendre son envol. Et les médias embarquent. La radio cet été; j’ai donné deux entrevues dont une à CIBL qui consacrait une série d’émissions à l’agriculture urbaine. J’ai adoré parler à la radio de quelque chose d’aussi visuel. On m’a proposé de faire une chronique l’été prochain. Je n’ai bien sûr pas refusé; un petit bénévolat bien agréable.

    31 août 2012
  4. sylvie pontbriand #

    Très touchant cette photo de jeune fiancée. Un de mes premiers souvenirs est la visite avec mon père d’un monsieur qui élevait des dindes. Ce qui m’avait impressionnée du haut de mes 3 ou 4 ans, c’est qu’il taillait les ergots (?) et je pense le bec d’en haut des dindons, C’est un souvenir flou…mais très impressionnant pour la petite fille que j’étais.

    31 août 2012
  5. Jean Provencher #

    Quand je m’arrête à cette image, chère Sylvie, je me dis «Ma chère mère ne savait pas le karma qui l’attendait». Son karma, on le découvre avec le passage des ans.

    1 septembre 2012

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