Scène d’été
Petit poème de J.-A. Lapointe qu’il intitule Scène d’été.
On connaît bien peu de choses sur ce Lapointe, qui fut journaliste. Il n’aimait guère parler de lui. À Jules Fournier qui lui demandait en 1914 des notes biographiques pour son recueil Les Iroquoises, il avait simplement répondu Je suis né à Boucherville, le 19 mars, en 1878, ce qui me donne un âge presque respectable. Les Jésuites m’ont fait connaître les secrets de la grammaire française — secrets que ma mémoire a mal gardés — puis j’ai commencé le struggle for life. La plupart des journaux français de Montréal ont publié des textes portants ma griffe. Chose extraordinaire, il paraît que ça ne les a pas conduits à la banqueroute. La critique a été clémente.
Lapointe a toujours signé J.-A., mais on ignorait son prénom. Était-ce Jules-Arthur ou Jacques-Athanase, personne ne le savait. Il fut président de l’École littéraire de Montréal et, en 1920, il est rédacteur au journal montréalais La Presse. Ce petit poème paraît dans Les Soirées de l’École littéraire de Montréal en 1925.
En les yeux agrandis des vaches
Qui ruminent à pleines dents,
Quand se meurent les jours ardents,
Le soleil met de rouges taches.
Je suis souvent allé m’asseoir,
Sur l’herbe qui nourrit ces bêtes
À l’heure très calme où leurs têtes
Commençaient à s’emplir de soir.
Cet instant est délicieux,
L’ombre pourpre drapait les cieux,
Le lointain n’avait pas de bornes.
Les vaches douces, sans bouger,
Rafraîchissaient au vent léger,
Leurs longues et railleuses cornes