Parlons donc bicyclette
À bicyclette, êtes-vous casse-cou, trompe-la-mort, comme ces Montréalais filant dans la rue Dorchester, sans doute excités par le printemps revenu ? Le journal La Patrie raconte le 1er mai 1897 :
Avec le retour de la belle saison, celui des bicycles naturellement. Ce qu’on en voit tous les jours, dans nos rues !
Ceux de la rue Dorchester ouest s’en donnent à cœur joie sur un asphalte qui n’a pas les vilaines rainures de tramway des rues St-Jacques et Notre-Dame; aussi quelle courses folles.
Il arrivera bien, l’un de ces jours, qu’un piéton se fera casser les jambes; ce sera tant pis pour les autorités municipales qui auront dans ce cas à payer des forts dommages au blessé pour n’avoir pas prêté la main davantage à l’observation des règlements municipaux qui défendent les courses dans nos rues.
Pour être franc, on se rend compte, à parcourir la presse québécoise du début du 20e siècle, que les journalistes sont souvent des « chiqueux de guenilles »; beaucoup des faits de la vie quotidienne en ville sont pour eux prétexte à un appel à une intervention policière. Voyez, par exemple, cet entrefilet du Soleil, à Québec, le 10 mars 1908 [nous sommes encore en hiver, bien sûr] : Les gens se plaignent beaucoup du nombre toujours grandissant des enfants qui se livrent à leurs jeux favoris dans nos rues : hockey, patin, etc., etc. La police devrait bien débarrasser nos rues de ces groupes encombrants qui sont une véritable nuisance.
Au début, j’étais bien porté à leur donner raison. Mais à tant les entendre maugréer, je me dis à la fin : N’est-ce pas cela la vie en ville ? Différente de celle de la campagne ? Et ces enfants de ville disposent-ils de parc, de place, de patinoire pour « lâcher leur fou » ?
Allez, trêve d’attaque contre la presse de ce temps. Je m’adresse maintenant à vous qui possédez un vélo. Dans la même édition de La Patrie, deux pages plus avant, voici, en ce printemps, des conseils de celui qui signe Le Chercheur pour l’entretien de votre chaîne de bicyclette. La vaseline, cette substance molle, onctueuse et incolore, est à l’honneur. Et puis la mine de plomb, tiens !
La chaîne est un des organes les plus importants de la bicyclette, puisque c’est par elle que se fait la transmission de la force.
Il importe donc qu’elle soit toujours très bien entretenue, car si les frottements des maillons sur les dents du pignon sont aussi doux que possible, on atténuera leur usure et l’on évitera des efforts inutiles.
Pour nettoyer complètement une chaîne, il faut la démonter en enlevant la vis ou le petit écrou qui en relie les deux extrémités, puis la faire tremper dans un bain de pétrole et la brosser avec soin pour retirer la poussière et la boue.
On la rince ensuite dans un second bain de pétrole propre; on l’essuie, on la remet en place, puis, au moyen d’une brosse (une brosse à dents hors d’usage fait très bien l’affaire), on l’enduit partout de vaseline ou mieux de la composition suivante qui est peu coûteuse et qui donne de très bons résultats :
On mélange intimement dans un vase quelconque de la vaseline et de la plombagine (mine de plomb dont on se sert pour frotter les poêles en fonte).
La proportion de plombagine doit être telle que le mélange obtenu ait à peu près la consistance du miel : assez ferme pour ne pas couler facilement et assez fluide pour bien pénétrer dans tous les maillons.
En effectuant de temps en temps cette opération qui occasionne une dépense insignifiante, on aura une chaîne qui durera très longtemps et qui engrènera facilement et sans bruit.
Résultat obtenu : un roulement meilleur avec moins de fatigue.
L‘illustration de ce cycliste, qui daterait de 1902, provient de Paukrus à l’adresse : http://www.flickr.com/photos/paukrus/4093835537/
De la vaseline sur une chaîne à vélo!
Je pense qu’une application de vaseline sur la chaîne ne la protégera pas et apportera son lot de complications. Badigeonnée de ce produit la chaîne aura tendance à retenir la poussière, le sable et les petites roches. Non je n’ai pas confiance.
Aujourd’hui, on utilise un lubrifiant cire autonettoyant. Cela ressemble à du lait quand on l’applique sur la chaîne, mais le produit sèche rapidement. Pendant la randonnée, cette cire se désagrège et en tombant elle entraîne la saleté avec elle.
Pour nettoyer la chaîne avec du pétrole, c’est ce que je fais périodiquement avec d’assez bons résultats. Cependant, je pense que c’est déconseillé par les experts, mais je ne sais pas pourquoi.
Ah, merci, monsieur Lépine, de ce commentaire. Bien sûr que de la vaseline sur une chaîne de vélo est sans doute un véritable ramasse-poussière. Les discours anciens ne sont vraiment pas toujours des discours de sagesse.