Le tapis de mon verger
Voici ses propositions en ce moment. Je le marche, c’est ce qu’il offre. Sans aucune forme de montage de ma part. Une patte d’éléphant d’abord. Un sol bien humide manifestement, à laisser pousser, puis mourir, tout ce qui pousse et meurt de branches dans les pommiers. Sans aucun montage, je vous le répète. Même les morceaux de branches de la dernière image, ossements de vieux temps, de la dernière saison, qu’il me faudra ramasser avant de tondre la pelouse. C’est fou, et bien beau dirais-je, la vie. Pour un verger libre, ça finit par ressembler à ça.
Un verger a bien le droit de vivre sa vie. Pourquoi l’obliger à se conformer à notre critère de rendement, ce critère dit de «progrès» que nous avons commencé à promouvoir dès le début du 19e siècle. Notion écrite en toutes lettres dans la presse de l’époque. Non, non, laissons filer au moins quelques-uns de nos petits vergers.
Et c’est ce qui me passionne et passionne mes bêtes diverses qui m’entourent : comment file au fil des années, comment s’affiche, comment se propose, comment se présente un petit verger laissé à lui-même. Avez-vous déjà imaginé être un petit vieux verger dans une autre vie, un petit vieux verger qui tient à ce qu’il est ? Comment arrive-t-il à offrir tous ses atours, à tout ce qui passe, à tout ce qui vit autour, en s’occupant de lui d’abord ?
Fichu défi. Le mien va bientôt avoir 100 ans. Je l’aime bien. Il est à lui.
Et je me rappelle encore. Il y a 36 ans, à l’achat de ce lieu, je voulais préserver cet humble verger de quelques dizaines d’arbres (pommiers et pruniers), planté au moment de la construction de la maison et de la grange, quelque part entre 1920 et 1922. Au ministère de l’Agriculture, on me répond : « Vous nous dites que vos arbres ont plus de 50 ans ! Monsieur, pour la production, la vie utile d’un pommier est de 10 à 30 ans. Faites du bois de chauffage avec vos vieux arbres. Et vous allez voir que c’est excellent comme bois de chauffage, un bois très dur. »
Au mieux, si je voulais alors garder ces arbres vivants et espérer des pommes «en santé», on me proposait 20 arrosages par année de divers produits, sauf au temps de la floraison, pour ne pas tuer les abeilles.
J’arrête ici. Un jour, je vous le promets — j’y pense tant depuis longtemps, ça s’appellera «le chant d’un petit verger» — je vous proposerai un texte sur la vie d’un verger heureux, tombé dans les pattes de quelqu’un qui avait envie qu’il vive sa propre vie, et non celle d’un verger domestiqué.
Bien d’accord pour laisser la vie aller jusqu’au bout. Il n’y a rien de plus beau qu’un jardin sauvage. Bonne journée!
Ah oui, chère Christiane. Bien beau dimanche à vous deux.
« C’est pas parce que je suis un vieux pommier que je donne de vieilles pommes », disait Félix Leclerc.
Ah, ce cher Félix, Belle Acadienne !
Vous avez bien raison Jean, il y a des limites à tout vouloir contrôler. L’humain est bien fort là-dessus. Pour ceux qui s’intéressent à la mise en place d’un petit veger « neuf » domestique à la manière sauvage, je vous suggère de faire des recherches sur la « PERMACULTURE », justement inspirée de la biodiversité et de la libre-expression de l’établissement des plantes dans leur environnement. Et ce, non pas dans un but unique de productivité, mais de perénité des cultures et de la qualité de l’écosystème qui s’y établit. Et celà s’applique aussi au petit terrain de la ville.
Moi aussi j’ai un petit verger « neuf », avec un vieux pommier que je n’arrive pas à couper même si un pic me la « saigner » il y a quelques années. Il tente de survivre tant bien que mal et je lui donne toute l’attention dont il a besoin car je le considère comme le gardien des petits nouveaux. La forêt sauvage enclave le verger de pommiers et de pruniers qui lui, entoure les arbustes de petits fruits de toutes espèces. De grandes zones de fleurs sauvages et de la menthe y poussent pour les insectes. Des tas de branches à l’orée du bois et des pierres misent en tas au soleil offrent autant de cachette à la faune qui s’y promène, y vie, y chasse…
Pas de traitement à part quelques branches coupées et un peu de tontes autour des arbres car s’est très humide chez-nous. Et les vieux pommiers, quelle allure ils ont! On les reconnait facilement, clairsemés ou en bande, à leur silouhette le long des routes, témoins d’un passé agricole en déclin. Ils sont là seuls, mais l’on peut deviner qu’il y avait jadis une maison, une ferme, une famille, une histoire….
Vive le diversité de la vie, chère Katy. Ça doit vraiment rendre joyeux quelqu’un qui aperçoit chez-vous toutes ces espèces animales ou végétales qui se manifestent ! Bravo!