Déménagez-vous finalement ?
Vous n’êtes pas sans savoir que, comme pour tout le monde, c’est aujourd’hui même que vous devez donner l’avis à votre propriétaire que vous déménagerez le 1er mai. Alors, c’est oui ou c’est non ?
Vous quittez votre loyer, voici ce qui vous attend. L’écrivain et avocat Napoléon Legendre (1841-1907) vous le raconte.
Dès l’aurore du premier février — chacun sait que cette aurore n’est pas très matinale — on est sur la rue, l’œil au vent pour découvrir les nouvelles affiches. Chaque écriteau est lu, analysé, commenté. On visite partout, de la cave au grenier, sans que les jambes se plaignent; on scrute tous les coins, les placards et les gardes-robes. On s’informe des causes qui chassent les locataires actuels, et, si elles ont quelque valeur, on cherche à l’atténuer. On forme des plans pour obvier aux inconvénients et tirer le meilleur parti possible des avantages. On mesure les fenêtres et la superficie des planchers; on place, de l’œil, les meubles et les cadres. Ici sera le fumoir, là, la chambre de couture, et, tout à côté, le cabinet où bébé fera son somme journalier. Tout le monde se verra et sera content. Le bruit agréable de la machine à coudre empêchera papa de dormir après dîner, ce qui est une habitude dangereuse pour la santé, et ennuyeuse pour les gens de la maison. La cuisine ouvre sur le réfectoire : on pourra se passer de Marguerite et ne garder que Marie, ce qui sera une économie notable. Bref, toutes réflexions faites, on va signer le bail, et, pendant les trois mois qui suivent, on ne vit que de plans et de projets.
Voilà. Il s’agit d’un extrait de l’ouvrage de Napoléon Legendre, Échos de Québec, publié à Québec en 1877, p. 29-31.
La gravure ci-haut provient de L’Album universel, édition du 3 mai 1902. On la retrouve à l’adresse suivante : http://bibnum2.banq.qc.ca/bna/illustrations/detail/5063.jpg