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Notre français est abâtardi !

Bien vrai ce que dit La Minerve dans son numéro de mardi et que nous reproduisons ci-après :

Par une singulière coïncidence, il vient de se produire, en même temps, de chaque côté de l’Atlantique, un mouvement pour la diffusion de la langue française dans le monde. En Europe, ce mouvement est parti de Paris. En Amérique, il est parti de New-York; quarante-cinq professeurs du «Columbia College» ont été les premiers à l’appuyer.

Nous n’avons pas à démontrer la supériorité du français, du point de vue classique sur les autres langues, pas plus que nous n’avons à démontrer l’importance qu’il y a pour la perpétuité des peuples d’honorer leur idiome national. Ce que nous voulons signaler, c’est le phénomène qui met en lumière le mouvement dont nous venons de parler.

Pendant qu’aux États-Unis, un groupe considérable de descendance saxonne, sans autre motif apparemment que le culte du beau et de l’utile, se passionne pour la langue française, au Canada, un groupe beaucoup plus considérable, et de descendance normande, au mépris du beau et de l’utile, se désintéresse graduellement de cette même langue, son véritable idiome national.

D’où cela vient, nous ne le dirons pas, pour moins humilier ceux qui donnent un pareil exemple d’aveuglement.

Comment cela se pratique, nous pouvons et nous devons même le dire, pour faire cesser un pareil état de choses.

Des Canadiens-français qui savent juste parler l’anglais pour être même difficilement compris par ceux qui l’entendent très bien, s’apostrophent imperturbablement par le «how do you do ?» (lisez «a di-dou»), ne sont jamais d’accord sans dire all right; ne conversent jamais entre eux sans dire post-office pour la poste, bill of fare pour menu, seal pour veau-marin, coal oil pour pétrole, pedigree pour généalogie, slippers pour pantoufles, sleigh pour traîneau, etc., etc., etc.

Nous en passons et des meilleurs.

Il y a des individus qui abjurent carrément leur nationalité. Que l’opprobre leur soit léger ! nous ne nous occupons pas d’eux ici. Mais, pour Dieu ! que ceux-là qui peuvent et qui veulent conserver leur langue la parlent donc, sinon il faudra demander aux professeurs américains de Columbia d’étendre jusqu’à Montréal leur mouvement pour la diffusion du français.

 

Source : Le Sorelois, 25 janvier 1884, p. 2.

L’image provient de Mon troisième livre de lecture, textes de Marguerite Forest et Madeleine Ouimet, illustrations de Jean-Charles Faucher, Montréal, Librairie Granger Frères Ltée, 1956. Il s’agit d’un ouvrage approuvé par le Conseil de l’Instruction publique de Québec, à sa séance du 12 mai 1943.

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