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Dans la série «D’autres habitants de la Terre» (1)

Un jour, on s’y mettra à plusieurs pour dépouiller la presse québécoise lointaine, afin de repérer ce qu’on disait d’autrui sur Terre. A-t-on parlé de Papetee, des Marquises, du Chili ? Comment présentait-on le Japon et la Chine ? Que pouvait savoir le lecteur québécois de la Hongrie, du Népal et du Bhoutan ? Avait-on conscience de l’importance de Constantinople (longtemps Byzance, aujourd’hui Istanbul) dans l’histoire humaine ?

Il est certain que dorment dans ces journaux anciens des visions, des perceptions du monde à travers ce qu’on en dit alors, et ce qu’en écrivent aussi les premières agences de presse auxquelles on s’abreuve. La Terre vue du Québec.

Voici l’Islande, le 28 septembre 1888, dans La Tribune, un hebdomadaire maskoutain. Le titre y va de ces mots : «Heureuse Islande. Où les portes ne sont jamais fermées à clef et où les besoins d’hôtels ne se font pas sentir».

Pour un pareil projet, il nous faudra, c’est certain, des historiens de la vie quotidienne de là-bas nous disant, grâce à internet, que le discours est absolument idyllique ou bien près de la vérité des choses. Avec la grande Toile, nous imaginerons de nouvelles manières de travailler en histoire. D’ailleurs, pourquoi n’y viendrait-on pas maintenant ?

Voici ce texte sur l’Islande en 1888 :

Il existe une nation qui conserve son identité depuis plus de mille ans, dont les familles principales réclament une suite d’ancêtres si longue qu’elle est presque mythologique, et dont les quatre vingt dix milles habitants vivent sous un code de quarante-trois articles seulement, qui forment toute leur jurisprudence. Son histoire ne fait mention que de deux voleurs; le crime est presque inconnu, et on ne voit jamais d’armées ou des hommes de police. Les sept-dixièmes de la classe instruite parlent, lisent et écrivent la langue latine couramment, et presque tous sont familiers avec l’anglais. Ce peuple prétend être le plus libre sur la terre en faisant ce qui lui plaît, pourvu qu’il n’intervienne pas dans les affaires des autres. Ils ne ferment jamais leurs portes à clef, n’ont pas d’hôtel, et donnent dans leurs maisons toute l’hospitalité désirable aux visiteurs. Ils se glorifient de posséder dans leurs veines le sang le plus pur et les plus brave qui coule parmi le genre humain aujourd’hui, et réclament les plus riches traditions des nations modernes.

Ils vivent dans un lieu où l’année fournit quarante et un jours de ténèbres complètes et un même nombre de clarté perpétuelle. Cette nation vit sur notre planète et habite l’île d’Islande.

Un Islandais instruit, Ludwig von Dolcke, qui a voyagé en Europe, a eu une entrevue avec un reporter du Pall Mall Gazette, de Londres. Il a entr’autres choses déclaré :

«On se méprend généralement sur l’Islande, et cela est dû, je suppose, au nom trompeur d’Islande (Iceland, en anglais). L’île, d’une superficie d’environ 42,000 milles carrés, est verte et fertile dans sa partie méridionale du mois de mai au mois d’octobre, alors que les rennes et les moutons paissent en liberté. En hiver, la neige est abondante. Le pays est sous le protectorat du Danemark, mais ça finit là. Il y a neuf provinces, dont chacune choisit douze des plus anciens et des plus sages de ses habitants pour remplir des fonctions quelque peu semblables à celles d’une législature d’état américain. Il y a aussi une assemblée nationale semblable à la chambre des représentants et un corps comme le sénat qui se réunit une fois par année. Mais il y a peu d’administration et point de loi à faire.

«Chaque individu se gouverne en toute chose d’après les principes les plus étendus de la liberté personnelle. Le sol appartient à quelques familles, et ceux qui travaillent la terre sont des serfs qui paient des rentes. Les voitures sont traînées par des ponies ou des rennes, et le pied de l’homme n’a jamais foulé le sol des montagnes du nord de l’Islande. La ville de Redjavik a environ 13,000 habitants, la majeure partie de la population vivant sur les propriétés. Les terrains de chasse et de pêche sont splendides, le gibier sauvage, comme dans le nord de l’Amérique, étant presque tout de couleur blanche. Les ours polaires qui descendent avec les icebergs fournissent une chasse populaire.

«L’Islandais est très fier de son pur et courageux sang normand. Vous savez que l’aristocratie française, anglaise et allemande, réclame au moins quelque trace du sang normand, et notre peuple n’en a pas d’autre.

«Je n’ai jamais entendu parler que de deux exemples de larcin. L’un était un Islandais qui s’était rompu le bras et toute sa famille souffrait de la faim en hiver. Il déroba plusieurs moutons et fut finalement surpris. Il fut immédiatement mis sous les soins d’un médecin pour sa blessure, des provisions furent envoyées à sa famille et en temps convenable on lui procura de l’ouvrage. Tel fut son châtiment. L’autre exemple est celui d’un Allemand qui vola dix-sept moutons. Il était à l’aise et le vol était malicieux. Son châtiment fut de vendre tout son bien, restituer la valeur de son vol et quitter le pays, ou être exécuté. Il se retira sur le champ.»

Après l’agriculture qui produit la baillarge, le seigle et les légumes, la grande industrie est l’élevage des moutons.

 

Le drapeau de l’Islande apparaît sur la page Wikipédia qui lui est consacrée.

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