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La prise de la Bastille (14 juillet)

Bonne Fête, Françaises, Français !

Tiens, pour souligner l’événement, la joie d’un quotidien montréalais. Le 15 juillet 1890, La Patrie est heureux de proposer à ses lecteurs un récit de la prise de La Bastille. C’est là une vieille forteresse en plein cœur de Paris, qui avait longtemps servi de prison et où on ne trouve plus que sept ou huit prisonniers. Le journal raconte :

 

Le comte Colonna Ceccaldi a trouvé récemment dans des papiers de famille une lettre que vient de publier la Nouvelle Revue. Ce qui donne, en ce mois de juillet 1890, un intérêt tout particulier à cette lettre, c’est la date : 15 juillet 1789. Elle contient une relation des événements qui se sont passés «la veille, mardi 14». Elle ne porte pas de signature. C’est une sorte de journal écrit «pour de chers camarades» qui attendaient impatiemment en Corse les nouvelles de Paris, en l’année troublée et féconde d’où date l’ère des temps modernes.

Le correspondant corse est un homme de la bourgeoisie; il appartient à cette classe, qui constituait depuis plus de deux siècles la trame solide de la nation. C’est aux membres d’une sorte d’association patriotique fondée par des bourgeois corses qu’il s’adresse. Ceci dit, voici quelques extraits de la lettre.

De la capitale, 15 juillet 1789 à minuit.

Mes chers amis, mes chers camarades, je brûle encore du feu de l’enthousiasme le plus vif, le plus grand, et je prends la plume malgré le désordre de mes idées pour oublier le moins qu’il me sera possible tant de circonstances que vingt-cinq ans ne suffiraient pour recueillir, ni cent pour raconter. Choses extraordinaires ! merveilles ! Aucune imagination ne peut y atteindre; j’ai vu, j’ai touché, je n’y crois pas encore; il me semble sortir d’un rêve ou d’une profonde léthargie. Hier et aujourd’hui, le 14 et le 15 juillet 1789, seront deux journées fameuses dans les annales françoises, dans l’histoire des révolutions de la terre.

Voilà le ton du témoin corse; citons maintenant un morceau capital, le récit de la prise de la Bastille.

On s’étoit transporté de nouveau, sur les trois heures, à l’Arsenal pour avoir les poudres; le directeur fit quelques difficultés, tint quelques mauvais propos; on s’en empara et on le conduisit à l’Hôtel de Ville. En chemin faisant, il fut percé de plus de mil coups d’épée et, en arrivant, il tomba mort. Une autre division étoit allée un peu plus loin pour entrer à la Bastille. M. de Launay, qui en était gouverneur, fit baisser le pont-levis et les fit entrer; dès qu’ils furent entre les deux ponts, il fit relever le premier qu’ils avoient passé et fit faire feu sur eux; cette horrible trahison se répandit bientôt; il y avoit déjà beaucoup de canons transportés des Invalides à la place des Invalides et près d’un bataillon des gardes françoises était venu se rendre tout entier, avec ses drapeaux. Deux à trois mille et bientôt plus de dix mille bourgeois s’y joignirent et volèrent avec elles, pêle-mêle et avec quatre pièces de canon, pour faire le siège de la Bastille; ils commencèrent à quatre heure et demie.

Le gouverneur fit tirer tout le canon de la Bastille à boulet et à mitraille; il étoit lui-même sur les créneaux à indiquer où il falloit tirer; l’attaque se faisoit du côté des ponts-levis; enfin, après avoir eu une vingtaine de personnes tuées et beaucoup de blessées, on a enlevé la Bastille d’assaut; chose aussi inconcevable qu’inouie. Un grenadier des gardes françoises sauta sur M. de Launay, l’arrêta et lui arracha sa croix de Saint-Louis; on avoit tué une grande partie de ceux qui défendoient la Bastille; c’était plusieurs compagnies d’invalides.

Le gouverneur et le lieutenant de Roi furent conduits à l’Hôtel de Ville. En y arrivant, ils étoient morts des coups qu’ils avoient reçus; c’étoit dans ce moment qu’on exécutoit M. de Flessielles [il s’agit de Jacques de Flesselles, un administrateur]; on coupa sa tête, celle du gouverneur et du lieutenant de Roi et celle de l’inspecteur des poudres; mais on ne mit que les deux premières chacune au bout d’une pique; on les promena dans toute la ville et on vint les exposer au Palais-Royal.

Un des canonniers de la Bastille qui avoit tiré fut pendu à une corde de réverbère, sur la place de la Grève, par ceux même qui l’avoient pris; on fit grâce aux autres. Tout ceci se passoit entre 6 et 7 heures du soir; on n’avoit employé que deux heures pour prendre la Bastille.

 

Pour beaucoup, la fête nationale de la France, le 14 juillet, commémore la prise de la Bastille. Mais il y a aussi commémoration, ce jour-là, semble-t-il, de la Fête de la Fédération célébrée, un an plus tard, au Champ-de-Mars.

Le dessin de la façade orientale de la Bastille provenant de la Bibliothèque nationale de France apparaît sur la page Wikipédia consacrée à la prise de la Bastille.

La gravure dépeignant des soldats ou des miliciens portant les têtes de Jacques de Flesselles et du marquis de Launay sur des piques apparaît sur la page Wikipédia consacré à Jacques de Flesselles.

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