Skip to content

Les jouets d’enfant à Québec au 19e siècle

En 1987, John Willis, mon collègue historien, et moi détenions un bien beau mandat, mener une étude sur Les modes de vie de la population de Place-Royale [à Québec] entre 1820 à 1859.

Soixante-treize inventaires après décès nous servaient de matière de base. À l’époque, lorsque quelqu’un décédait, il était coutume qu’un notaire fasse l’inventaire de ses biens. John et moi entrions donc avec ces notaires dans les magasins, les résidences. Nous allions «sentir» comment les gens vivaient.

Je vous racontais que nous avions eu le plaisir à cette occasion de découvrir chez un pilote de navire une copie du grand livre de John Milton, Paradise Lost. À la vérité, les surprises furent bien nombreuses. Mais arrêtons-nous aux jeux et aux jouets.

Avant notre passage, les archéologues avaient d’abord trouvé des billes, en pierre ou en terre cuite, des parties de poupées en usage au 19e siècle, une tête et trois jambes de porcelaine, par exemple, et quelques pièces de vaisselle miniature, des dominos, des dames.

Dans le grenier chez Joseph Leblond, voilà ce que le notaire dit être un «chariot d’enfant» et, chez Joseph Carrier, un cheval de bois. Mais entrer chez Isaac Devlin fut un vrai bonheur. Celui-ci est horloger et tient boutique tout juste au pied de la côte de la Montagne, rue Notre-Dame.

Quand vous gagnerez Place-Royale en descendant de la Montagne, remarquez tout juste à droite les fondations de deux maisons ayant appartenu, sous le Régime français, à Guillaume Gaillard et à Jean Soulard. Au 19e siècle, Devlin y a son commerce d’horloger. L’enfant choyé aime y entrer pour admirer les nombreux jouets musicaux à ressort, dont un petit manège.

Sans doute que seuls les enfants de riches peuvent rêver de recevoir de semblables jouets en cadeaux au Jour de l’An. En Europe, on les produit seulement depuis la fin du 18e siècle, soit depuis qu’on peut mécaniser le travail de laminage, d’estampage, de perçage, d’emboutissage et de découpage. Et voilà ces beaux objets à Québec.

Ah, je me serais fait ami avec ce Devlin.

— O —

À noter qu’à l’époque, à Québec, les artisans d’un même métier aiment se retrouver sur la même rue. Ainsi la rue Notre-Dame, à Place-Royale, est la rue des horlogers. Dans un répertoire des fabricants, réparateurs et vendeurs d’horl0ges, de pendules et de montres (G. Edmond Burrows, Canadian Clocks and Clockmakers, 1973), on recense 84 horlogers à Québec pour la période de 1820 à 1859. Dix-sept d »entre eux ont pignon sur rue, à un moment ou à un autre de leur carrière, à Place-Royale : William Burgess, Thomas et George Cathro, David Couture, David Denny, Isaac Devlin, P. Devlin, Laurence Gauthier, Edward B. Harris, Edwin Hull, John Martyn, père et fils, Samuel McLaughlin, Robert Neil, Thomas O’Donohue, William Smith et L. T. Solomon. Neuf habitent rue Notre-Dame, un, rue Champlain et 6, rue Saint-Pierre. La rue Notre-Dame est la préférée des horlogers; en tout temps, on y en trouvera au moins un. Il est intéressant de noter aussi que les horlogers semblent se succéder dans un même local, lorsqu’ils ne se font pas franchement concurrence.

Publier un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Vous pouvez utiliser des balises HTML de base dans votre commentaire.

S'abonner aux commentaires via RSS