C’est beaucoup dans l’enfance que nous nous sensibilisons ou non à la Nature
Voilà l’avis de Louise Chawla, professeur émérite à l’université de Colorado, Boulder, travaillant en psychologie de l’environnement et étudiant, en particulier, les bénéfices de la Nature chez les enfants. Elle a coordonné pendant 10 ans le programme de l’UNESCO « Grandir en ville ».
Les éléments naturels produisent les mêmes effets [qu’un hochet], mais assortis d’une richesse sensorielle beaucoup plus grande et de possibilités beaucoup plus vastes que n’importe quel jouet. Par exemple, en jouant avec de l’eau, les enfants apprennent qu’ils peuvent éclabousser, la verser, la canaliser, l’endiguer, la mélanger avec du sable pour en faire une pâte plus ou moins épaisse, y faire flotter — et couler — des objets, y souffler des bulles, y nager…
Ils apprennent que l’eau possède toutes ces qualités et qu’eux-mêmes peuvent faire tout cela. L’environnement naturel est le seul à offrir autant de défis aux enfants pour réaliser progressivement de nouveaux exploits et d’en marquer les étapes : la pierre qui hier était trop lourde peut aujourd’hui être retournée ; cette branche de l’arbre est toujours hors de portée, mais aujourd’hui, l’espacement de ces branches est parfait pour y grimper. […]
Contrairement aux objets manufacturés fabriqués en série pour répondre à des demandes socialement définies, comme les petites voitures ou les dînettes, chaque objet dans la nature est unique et offre des possibilités d’usages créatifs. Le monde naturel se compose de pièces détachées que les enfants peuvent manipuler, combiner et recombiner au gré de leur inventivité. Des brindilles, des pierres, des feuilles et des brins d’herbe peuvent être agencés pour en faire une œuvre d’art, mener un combat, préparer un repas imaginaire ou construire une forteresse ou une maison de fées. Des décennies de recherches montrent que les enfants qui jouent en milieu naturel sont plus créatifs et plus collaboratifs que ceux qui jouent dans les aires de jeu artificielles.
Parce que les habitats naturels sont des systèmes en évolution constante, il y a toujours quelque chose à découvrir. Si les forêts, les plages ou les jardins ont des cycles récurrents, ils ne sont jamais identiques : le chant des criquets et des oiseaux n’est jamais exactement le même. Les vieilles souches n’abritent jamais les mêmes communautés d’insectes. Quand les enfants créent un barrage dans un ruisseau, celui-ci ne fera jamais les mêmes flaques et ne débordera jamais de la même façon, l’eau qui coule ne fera jamais la même musique, sa force ne sera jamais la même, ni la lumière qu’elle reflète selon les jours et le temps qu’il fait. Ainsi, même s’ils jouent pour la IIIème fois dans le même ruisseau ou le même bois, les enfants y découvrent un monde qui se renouvelle à l’infini.
Pour prendre du plaisir à jouer librement en pleine nature, les enfants ont besoin du soutien des adultes., D’abord, les adultes doivent rendre la nature accessible, en construisant des parcs, en choisissant un logement proche d’une zone naturelle, en ménageant un peu de nature sauvage dans leur jardin ou dans les cours de récréation. Mais ils doivent aussi encourager les enfants en leur permettant de jouer dehors, de prendre des risques et de se salir. […]
Louise Chawla, extrait de « Les soins de la nature chez les enfants et les adolescents. Expériences marquantes pour le développement du sens de la connexion », p. 197s., traduction de Ilona Bossanyi et Anne-Caroline Prévot, corrigée par l’auteur, dans un collectif sous la direction de Cynthia Fleury et Anne-Caroline Prévot, Le souci de la nature. Apprendre, inventer, gouverner, Paris, CNRS Éditons, 2017, 378 pages.
Regard intéressant que porte ce livre sur le développement des enfants.
Joyeuses Pâques !
À toi aussi, cher Claude, Joyeuses Pâques à toi !