Une dame difficile à conquérir
Dans la série «Poème des temps d’hier».
Aventure
Après la valse, en vous disant
Je ne sais plus quelle fadaise
Je vous trouvai l’air séduisant
Et me sentis tout rempli d’aise,
Vers minuit, m’étant enhardi,
En vous quittant, je vous ai dit :
«Demain, soyez à la fenêtre ?»
Vous m’avez répondu : «Peut-être…»
Et ce demain-là, palpitant,
Je suis allé dans votre rue.
J’y fis, pendant un bon instant,
Pour vos beaux yeux, le pied de grue.
Avant qu’on levât le rideau,
J’eus le temps d’écrire un rondeau !…
Je demandai : «Vous reverrai-je ?»
Vous m’avez répondu : «Que sais-je ?»
Mais je revins le lendemain,
(Je m’entête quand je m’antiche),
Et j’attendis — c’est inhumain !—
Le temps d’écrire un acrostiche !……
Alors je me suis décidé.
J’ai frappé, puis j’ai demandé :
«L’amour va-t-il se mettre en route ?»
Vous m’avez répondu «J’en doute».
Ah ! d’honneur ! vous m’intéressiez !
Peut-être Que sais-je ?.. J’en doute…
Ainsi, dans mon cœur, vous versiez.
Du scepticisme, goute à goutte.
Or, usant d’un beau style, un jour,
Je vous dis : «Quand, ma chère amour,
«À vos rigueurs ferez-vous trêve ?»
Vous m’avez répondu : «J’y rêve….»
Pour le coup, c’était excessif,
Et, remâchant cette réponse,
Je m’en retournai, tout pensif,
Songeant à part moi : «J’y renonce !»
Je repassai, pourtant, le soir,
Et vous dis : «Allez vous asseoir».
«Je suis là de votre système.»
Vous m’avez répondu «Je t’aime».
L’Écho des Bois-Francs (Victoriaville), 15 octobre 1898.