Qu’attend-t-on pour créer des parcs pour les enfants à Québec ?
Les enfants, occupons-nous en donc un peu, au point de vue hygiénique; ce sont nos futurs remplaçants dans quelques années; il est donc de toute nécessité de les bien traiter.
Comme nous les négligeons, nous ne disons pas dans la famille, mais dans la ville, dans cette bonne ville de Québec.
Nous en sommes rendus à la saison des chaleurs; elles durent près de deux mois au Canada, et ne fait pas à demi. On a dû s’en apercevoir ces jours derniers.
Bien des gamins et des gamines, depuis deux à quinze ans, ont échappés aux dernières chaleurs et ne subiront pas les autres que l’avenir nous réserve.
Les parents les ont amenés ou envoyés aux stations balnéaires de la côte. Les petiots prennent leurs ébats sur la grève ou sur l’herbette, hument les senteurs du varech et la prairie, et s’en donnent tout et plus; mais il s’en faut que ce soit la majorité des enfants qui puisse jouir de ces avantages.
La majorité des enfants reste à la ville, et dans quelle condition, grand Dieu ! Les petits ayant besoin d’amusement, d’exercices, de gaîté, n’ont pas d’autres ressources que le pavé brûlant, la poussière de la rue, au grand ennui des parents, des passants et des voisins, et au grand détriment des enfants eux-mêmes.
Il n’y a pas à Québec le moindre petit parc avec jets d’eau, pelouse, plantations d’arbres où l’on puisse mener les enfants prendre leurs ébats, quand ils ne peuvent pas avoir le bénéfice d’une promenade à la campagne.
Ce qu’il y a de pénible, c’est que personne n’y songe. Les gens qui ont suffisamment d’argent pour se payer des promenades au loin, oublient bien vite les pauvres gens que l’indigence force de rester dans leur trou.
Dans les grandes villes américaines, on a plus de souci de l’enfance; plusieurs familles se réunissent et s’entendent sur l’achat ou l’affermage d’un terrain vacant qu’ils convertissent en un parc; sur ce terrain, les enfants de ces familles vont passer une partie de la journée sous la surveillance des bonnes, un gardien est attaché au parc et est chargé de recueillir les permis d’entrée de la part des bonnes ou gouvernantes.
Le procédé vous va-t-il, messieurs les Québecquois ?
S’il vous va, n’auriez-vous pas un jour la fantaisie de l’imiter ?
Non seulement les enfants en profiteront, mais vous-même aussi vous en jouirez à vos heures de loisir.
Le Franco-Canadien (Saint-Jean-sur-Richelieu), 21 juillet 1883.
La photographie de jeunes filles du camp d’été de la Young Men’s Christian organisation (Y.M.C.A.) dans les glissoires du parc Lafontaine à Montréal, une image de Conrad Poirier, datée du 24 juillet 1942, est déposée à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec, cote : P48S1P07534.
Contribution à une histoire de l’enfant québécois.