Le baseball va bien mal à Montréal
Le chroniqueur sportif de l’hebdomadaire Le Bulletin en a vraiment, mais vraiment, ras-le-bol. La comédie a assez duré. Sous le titre «Nous en sommes dégoûtés», il y va de ce texte le dimanche 27 mai 1906.
Le club de baseball Montréal nous a quittés vendredi pour nous revenir que dans quinze jours. C’est là le vœu unanime de tous ceux qui suivent assidument les parties de baseball jouées si misérablement par les hommes de Jimmy Bannon.
C’est toujours la même histoire depuis six ans. Avant que de commencer la saison, on nous fait toujours un «monde» des joueurs qui doivent figurer sur l’équipe, et aussitôt que nous avons le malheur de les voir à l’œuvre, nous ne tardons pas à nous en dégoûter.
Montréal, bien que ce soit reconnu comme l’une des villes payantes à ce point de vue, peut être qualifiée d’hôpital d’incurables. Depuis l’année où nous remportions le championnat, notre club a toujours été composé de boiteux, de maladroits et de nullités. Quand nous avions l’avantage d’avoir de bons coureurs de buts, les frappeurs nous faisaient défaut. Aujourd’hui nous sommes forcés de l’admettre. Nous avons un club de trente-sixième ordre qui ne peut même pas se maintenir en tête de la seconde division.
Cela se comprend. Les directeurs, tout aussi chiches les uns que les autres, ne veulent pas sortir leurs sous et il s’ensuit naturellement des résultats fatals. Notre capitaine qui est un joueur d’expérience a bien la bonne volonté et le désir ardent de voir briller son club, mais avec un contingent pareil, il est impossible de faire mieux.
Les joueurs ne frappent pas, ils courent très mal les buts et font nombre de bévues impardonnables. Massey, J. Bannon et Wagner ne devraient plus jouer dans cette ligue. Les autres ont également besoin de pratique, mais ils peuvent encore rendre de bons services.
Le «staff» de pitchers est médiocre. During et Mottern sont nuls. Bref, notre club est nullement capable de lutter contre la majorité des autres équipes qui composent la ligue de l’Est.
Jusqu’à présent, les directeurs n’ont pas eu lieu de se plaindre du public. Ils ont été libéralement encouragés. Mais si les choses continuent aussi mal, il se produira alors un changement qui, cette fois, fera réfléchir ceux qui se sont ri de l’indulgence de ceux qui les ont toujours patronnés.