Que peut-on dire du Verseau en 1887 ?
Si l’on en croit les anciens et les doctes dissertateurs qui ont compulsé les œuvres d’Ovide et de Virgile, le onzième signe du zodiaque, le Verseau, représente Ganymède que Jupiter fit enlever par un aigle pour lui verser le nectar en remplacement d’Hébé.
À cause de l’urne remplie du liquide que Ganymède ne cessait de vider dans la coupe des dieux, les Latins donnèrent à ce signe zodiacal le nom d’Amphora. D’autres savants prétendent qu’il a été ainsi nommé parce qu’il annonçait aux Égyptiens l’inondation du Nil.
Sans vouloir prendre parti dans cette question d’étymologie, le Verseau nous paraît bien mériter son nom… même dans nos climats. Du 21 janvier au 18 février, laps de temps pendant lequel le soleil semble parcourir cette constellation, nous sommes, à proprement parler, dans la saison des pluies.
Il est vrai que, depuis quelques années, cette distinction devient de moins en moins sensible : le Verseau semble régner en souverain éternel dans le Zodiaque, et Ganymède doit avoir à son amphore une énorme fêlure par laquelle s’échappe le nectar divin qui se transforme en eau dans l’éther et retombe en ondées diluviennes sur les pauvres mortels. […]
Comme consolation et pour faire diversion aux tristesses qu’évoque dans l’âme humaine cette saison des pluies, les astrologues tirent un horoscope favorable des personnes nées sous le signe zodiacal du Verseau. Ces personnes seront, assurent-ils d’une grande vivacité et se mettront volontiers en colère. Néanmoins, elles tiendront à obliger leurs amis. Elles sauront garder un secret, et joindront à la beauté de la figure et de la taille la subtilité et le génie.
Le Monde illustré (Montréal), 29 janvier 1887. Manifestement, ce texte n’est pas québécois. Il est bien rare que ce temps de l’année au Québec soit celui de la «saison des pluies».
