La ruée vers l’or
En 1896, on découvre d’importants dépôts d’or le long du fleuve Klondike, au Yukon. Un an plus tard, de partout en Amérique, on arrive par dizaines de milliers de personnes dans cette région dans l’espoir de faire fortune instantanément. C’est la folie. La ville de Dawson City est fondée au confluent des fleuves Yukon et Klondike près du lieu de la première découverte. Des Québécois en grand nombre vendent tous leurs biens pour payer leur voyage et leur séjour au Yukon. La presse annonce constamment des départs vers le Nord-Ouest. Mais beaucoup reviendront désillusionnés, car le travail est très dur et, à compter de 1899, la source est tarie.
Dans L’Écho des Bois-Francs du 18 mars 1899, voici la lettre de Napoléon Marcoux à son père depuis là-bas. Manifestement, le jeune vit d’espérance.
Dawson City, 10 janvier 1899
Cher bon père,
Veuillez me pardonner d’avoir retardé à vous écrire, c’est que j’attendais pour vous donner plus de nouvelles du pays et de mon ouvrage. J’ai été sur la crique Dominion, à 40 milles de Dawson, emportant mes provisions et mes outils sur mon dos, car il n’y a pas d’animaux ici pour nous aider. J’ai bâti une cabine et percé trois trous de 24, 26 et 30 pieds de profondeur sans succès, je n’ai rien trouvé.
Après avoir travaillé là deux mois, je suis retourné à Dawson où j’ai passé deux jours pour me reposer. Je me suis associé un Irlandais pour aller prospecter sur la «Friny Hall». Là pour résidence, nous avons mis deux tentes l’une sur l’autre et des branches.
Nous avons percé deux trous, un de 48 pieds et l’autre de 51, et là encore, nous n’avons rien trouvé. Mais j’ai toujours l’intention de prospecter tant que mes provisions ne manqueront pas et j’en ai en quantité suffisante jusqu’au printemps.
L’or n ‘est pas aussi commun qu’on pensait. Les gages sont d’une piastre de l’heure, mais quand on a besoin d’un homme, il y en a vingt qui s’offrent. Les temps sont durs; il y a beaucoup trop de monde; plusieurs personnes font leurs préparatifs pour partir au printemps, cela va rendre les temps meilleurs.
Les provisions sont chères. Le sucre vaut 80 cts la livre, le beurre $1,75, le lait 75 cts la pinte, le bacon 60 cts, la farine $9.00 par cinquante livres et ainsi de suite.
Je vous dis que le riche n’a pas d’affaire ici. Je ne regrette pas encore mon voyage pourtant. Quand on ne travaille que trois mois par année, on est bien pour un an et je cours ma chance.
Le climat n’est pas aussi froid que vous pensez, parce que le vent ne souffle pas. Le 22 octobre, le thermomètre marquait 22 au-dessous de zéro, et aujourd’hui il varie entre 45 et 60 degrés. Je vous assure que les manches de chemise ne nous nuisent pas.
Je pense à présent travailler un claim à Brar crique. J’espère de faire un peu mieux mon affaire. Les provisions ont baissé, on en a pour deux ans.
Papa, ne soyez pas inquiet de moi. Je commence à connaître mieux, je puis voir un peu plus en avant de moi, je pense que ça va aller mieux. Je suis engagé pour l’année prochaine, du 1er septembre au mois de juillet.
Nous n’avons pas encore eu de malle cet hiver.
Écrivez-moi souvent et écrivez m’en long, donnez-moi toutes les nouvelles, n’ayez pas peur de m’en dire trop, c’est mon seul désennui.
Je suis bien, je suis gros et gras. Quand je suis parti, je ne pesais que 150 lbs et maintenant je pèse 169 lbs.
Veuillez présenter mes amitiés aux parents et amis et agréez mes respects.
Votre fils.
Napoléon Marcoux.
Pourquoi donc le père du jeune Marcoux a-t-il accepté que la lettre de son fils soit ainsi publiée ? Peut-être est-ce dans le but de décourager ceux qui auraient encore envie de partir pour le Klondike.
L’image ci-haut provient de la page Wikipédia sur cette ruée vers l’or.
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