Ces chères étoiles filantes

Bien oui, à quelques reprises sur ce site, je disais l’intérêt de la presse québécoise voilà 100 ans pour les phénomènes célestes, en particulier ceux de la nuit. Comme aujourd’hui d’ailleurs. Voilà bien longtemps que nous nous interrogeons le ciel.

En ce moment, par exemple, comme à chaque année, nous sommes en période d’étoiles filantes. La Patrie du 23 novembre 1895 reproduit un article d’Henri de Parville (1838-1909), un vulgarisateur scientifique français, à ce sujet.

Les étoiles filantes abondent à certaines époques de l’année. Nous allons arriver à l’une des époques. Deux dates en novembre sont bien connues pour les apparitions de météores. La première a été en 1895, le mercredi 13 novembre. L’autre date d’apparition sera celle du samedi 23 novembre. On devra surveiller l’extrémité orientale d’Andromède, du côté de Persée.

Il y a des années où la pluie d’étoiles filantes est faible; d’autres où elle est abondante. Nous approchons du moment où les météores seront en grand nombre. Parmi les averses les plus remarquables, on cite celles des années 1799, 1833, 1866. La période est voisine de trente-trois ans. […]

L’origine des étoiles filantes est encore sujette à contestation. Depuis que l’astronome milanais Schiaparelli a découvert que certaines apparitions d’étoiles circulaient dans la même orbite que certaines planètes, on a généralement admis que ces météores n’étaient que des résidus, des morceaux de comètes. Ces astres errants, en s’approchant du soleil, laissent derrière eux, aux dépens de leur propre substance, une traînée ou queue de plusieurs millions de kilomètres de longueur; quelquefois la comète se divise en plusieurs morceaux qui suivent la route primitive de cette comète. […]

Le fait du morcellement se renouvelle chaque fois que l’astre en décomposition revient dans les environs du soleil, il en résulte qu’au bout d’un certain temps toute la matière de la comète s’égrène le long de son parcours.

Quand la terre passe, à certaines époques, dans le voisinage de l’orbite de l’astre, elle rencontre des morceaux errants qui, attirés dans sa sphère d’action comme des mouches par la lumière d’une lampe, pénètrent dans les hautes régions de l’atmosphère avec des vitesses énormes de plus de 42 kilomètres à la seconde. Ces projectiles chassent l’air devant eux, le compriment étroitement et, comme l’expérience bien connue du briquet atmosphérique, cette compression engendre assez de chaleur pour que la matière devienne incandescente et s’enflamme, produisant cette belle traînée lumineuse que tout le monde connaît. […] Mais nous le répétons, on en est encore à cet égard aux hypothèses les plus conformes à l’observation.

Les étoiles du 14 novembre sont connues sous le nom de Léonides, parce qu’elles paraissent sortir de la constellation du Lion. Elles semblent provenir de la dislocation d’une comète passée près du soleil le 11 janvier 1866. Leur nombre, observé pendant les belles apparitions, s’est élevé à plus de 240,000 en une nuit. Le 27 novembre, il y a souvent aussi une pluie remarquable. En 1872 et 1885, le nombre des étoiles observées a dépassé cent mille.

Il sera donc intéressant de lever les yeux au ciel dans les soirées des 22, 23, 24 novembre, et dans celles de 26, 27 et 28 du même mois. Si le ciel est propice, on assistera à un spectacle qui en vaut bien un autre.