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Hommage au Léontodon d’automne

leontodon-unDans le monde de la botanique, il y a des vies qui se vivent hors de nous dans la nature, en parallèle, sans que nous ne le sachions. Et les plantes de ce monde beaucoup inconnu sont de deux types.

Certaines, bien acclimatées, occupent un lieu précis depuis plusieurs centaines d’années; on parle alors d’indigènes.

D’autres, grandes voyageuses, venues d’ailleurs, sont là depuis peu à l’échelle du temps. Beaucoup d’humains, dont plusieurs scientifiques, ne les aiment guère, elles sont dites envahissantes, car, polyvalentes, capables d’habiter de nombreux milieux, ayant développé une grande capacité d’adaptation. Invariablement, elles bousculent la vie déjà sur place. Et, souvent, les indigènes en paient le prix. Voilà arrivées les «mauvaises herbes».

Le Léontodon d’automne (Leontodon autumnalis, Autumn Hawkbit) est l’une de ces plantes parties de bien loin. Qui sait qu’à nos pieds, ce végétal, appelé Liondent d’automne en France, poursuit sa course vers l’Ouest. On raconte qu’il est présent dans l’Europe moyenne et septentrionale, même en Sibérie, et qu’en France on le retrouve dans les prés et les pâturages, mais plus rarement dans la région méditerranéenne. C’est donc une plante de moyen Nord plutôt que de pays chauds.

Comment est-elle arrivée en Amérique, on l’ignore. Peut-être échappée de bateau.

En 1968, le biologiste et agronome Camille Rousseau nous a fait cadeau d’un formidable travail, «Histoire, habitat et distribution de 220 plantes introduites au Québec», paru dans le Naturaliste canadien, numéro 95, p. 49-169. Par bonheur, il consacre un paragraphe à ce léontodon.

Celui-ci est signalé pour la première fois en 1829, en Nouvelle-Écosse. Puis, en 1862, le naturaliste Léon Provancher le décrit, sans préciser sa distribution. Vingt ans plus tard, le botaniste John Macoun le récolte à Gaspé. Il serait présent aussi bien dans les terrains vagues, les pelouses et les pâturages que le long des routes et des fossés. En 1904, il a déjà gagné l’île d’Anticosti. Tout de même, il sera longtemps «contenu» dans les Maritimes, la Gaspésie et les îles de la Madeleine.

Mais sa marche vers l’Ouest s’active. En 1958, Clarence Frankton, spécialiste des mauvaises herbes au ministère de l’Agriculture du Canada, affirme qu’il se répand rapidement dans le Québec [davantage sur la rive sud du Saint-Laurent que sur la rive nord, semble-t-il, selon le tableau proposé par Rousseau], particulièrement dans les Cantons de l’Est. Et le biologiste Rousseau de terminer ainsi son paragraphe sur le Léontodon d’automne : «Ce commentaire s’applique aussi à la région de Montréal. Il semble bien que nous sommes en présence de deux foyers d’infestation : l’un, très ancien, en provenance des Maritimes a atteint depuis le siècle dernier une partie importante du Golfe St-Laurent puisque Schmitt (1904) mentionne déjà cette espèce sur l’Île d’Anticosti; l’autre, beaucoup plus récent, peut-être originaire des États américains adjacents, apparaît en pleine expansion dans la Beauce et tous les comtés adjacents à la frontière américaine.»

Chez moi, le Léontodon d’automne est en ce moment flamboyant, malgré de grandes pluies froides et même après avoir traversé une nuit à moins 7 et une autre à moins 8. Tout à fait sans aucun butineur, tous disparus, il continue de proposer des fleurs. Comme quoi, voilà une plante bien aguerrie pour faire face au climat québécois.

Tout ce qu’il faut espérer, c’est que personne ne se mette à crier à la nécessité d’herbicides comme certains en Colombie britannique. Les débats actuels sur la nécessité de prendre soin de la Terre devraient plutôt nous mener au rejet des herbicides, à l’acceptation de ces plantes venues d’ailleurs, qu’on continue de qualifier d’envahissantes et de mauvaises herbes. Sinon, chers amis, il ne fallait pas faire la promotion des voyages du 16e siècle jusqu’à aujourd’hui, apportant avec nous, consciemment ou non, une grande variété de plantes ou d’insectes, non plus que, depuis ce temps, la promotion des échanges économiques sur la planète.

J’aime beaucoup le Léontodon d’automne. Sa présence chez moi est heureuse. Et, depuis août, il fut bien aimé des butineurs, en particulier de mon abeille attachante.

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