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Grand incendie de la manufacture de tabac MacDonald à Montréal

manufacture macdonald en feu

L’immense manufacture sur la rue Ontario, entre les rues Poupart et Iberville, est une perte complète.

Vingt personnes blessées dont quatre mortellement; plus de 600 jeunes ouvrières exposées à être brûlées vives ne pouvant s’échapper, tous moyens de sauvetage faisant complètement défaut; plusieurs pompiers à demi asphyxiés et plus de 1,000 ouvriers sans emploi, tel est le bilan de cette journée néfaste pour la partie Est. […]

Un peu après 5 heures, le contremaître des ouvriers, qui travaillaient au troisième étage, découvrit le feu dans le séchoir et il descendit à la course donner l’alarme. […] On comprend la panique qui se produisit parmi ces ouvrières à la nouvelle que le feu était dans la bâtisse. La scène qui suivit est indescriptible. Dans tout ce vaste établissement, il n’y avait pas une seule échelle, pas le moindre appareil de sauvetage.

On ne saurait imaginer l’indignation du public à la nouvelle que les inspecteurs préposés aux manufactures avaient laissé subsister cet état de choses.

Ajoutons que les fenêtres étaient fortement grillées de telle sorte qu’il était impossible d’enlever le grillage d’en dehors et presqu’impossible à l’intérieur. On imagine la situation horrible où se trouvaient placées ces pauvres filles. Un grand nombre perdirent connaissance, d’autres criaient et pleuraient et un très grand nombre encore se bousculaient vers les deux seuls escaliers qui se trouvaient dans toute cette bâtisse. Quelques-unes se ruaient sur le grillage s’efforçant de le faire sauter, mais en vain.

À l’arrière du corps principal de la bâtisse, il y avait une remise servant d’entrepôt pour les marchandises et dont le toit pouvait atteindre aux fenêtres du premier étage. Comme la chaleur devenait intense et la fumée insupportable, les malheureuses du quatrième étage après des efforts désespérés réussirent à forcer quelques-unes des fenêtres. Alors une poussée se produisit et celles qui se trouvaient près des fenêtres furent obligées de sauter en bas, sur le toit de la remise. Plus de vingt sautèrent ainsi ou furent jetées de force et se blessèrent dans leur chute.

Un cri de stupeur s’échappa alors de la foule énorme qui assistait à ce drame terrible. Et l’on commença à transporter les blessées. […] À six heures et demie, les flammes envahissaient tout l’édifice et s’élevaient à une prodigieuse hauteur, gagnant en un instant la tour centrale. À ce moment, un cri d’angoisse s’élève de la poitrine des dix mille personnes qui encombrent les rues environnantes. […]

Les femmes tombaient à genoux et se lamentaient en criant «Mon Dieu, ils vont brûler ! À leur secours !» Etc. […]

Trois prêtres étaient présent et se préparaient à administrer les braves pompiers qui se trouvaient entre la vie et la mort,

Leur sang-froid et leur courage ont été admirés de la multitude et tous faisaient leurs éloges.

Après ces sauvetages émouvants, le feu rageait aux troisième et quatrième étages. Le dôme n’existait plus et l’air était empesté par l’affreuse odeur de tabac brûlé. […]

Les pompiers ont travaillé toute la nuit et, ce matin, le feu était encore dans les décombres.

Plusieurs jeunes filles ont déclaré à un de nos reporters que, lorsque le feu a éclaté, le gardien les a empêchées de se sauver en leur disant que celles qui sortiraient seraient expulsées le lendemain.

Nos reporters se sont faufilés dans différents groupes de personnes qui regardaient brûler l’édifice, et toutes étaient indignées de voir qu’il n’y avait pas d’échelles de sauvetage attachées à l’édifice.

 

La Patrie (Montréal), 26 avril 1895.

L’illustration provient de l’hebdomadaire montréalais Le Monde illustré, du 4 mai 1895. On la retrouve sur le site de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, au descripteur «Incendies».

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