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Ah le printemps !

on remonte les clotures

Dans La Tribune du 15 juin 1894, extrait de ce qu’elle dit être la Revue commerciale, voilà un éloge de cette saison des recommencements.

Quelle admirable saison pour le cultivateur que le printemps ! Après de longs mois, restée sans parure, la terre vient de revêtir sa robe verte de jeune fille. Tout sourit au cultivateur. Tout semble lui dire : Espère.

Tout, en effet, est couleur d’espérance. Les seigles, les blés, les prairies rivalisent de verdure. Et l’homme de la campagne, dont les travaux sont achevés, tout en laissant ses calculs, en comptant sous les apparences, s’arrête en face du meilleur de son champ; il admire la nature, il entend l’alouette, son compagnon, ce gai plébéien de la plaine qui porte jusqu’au plus haut des cieux ses chants d’amour et de résurrection.

Le blé couché dans les sillons semblait mort, il ressuscite; l’insecte sorti de la chrysalide, son linceul, ouvre ses ailes; les arbres chauves renaissent avec des chevelures touffues; les oiseaux recommencent leurs concerts en plein air; ils ont rattrapé leur voix, et voilà que tout pousse, tout chante et tout sonne. C’est la pâques, c’est la résurrection de la nature.

Tout renaît aussi au cœur, à l’imagination, de l’homme resté sensible et bon. Le parfum des plantes nouvelles excite son odorat, le gazon diapré de pâquerettes réjouit la vue, ces chants dans les arbres, le bourdonnement dans les herbes charment son oreille. […]

Le cerveau qui reçoit toutes ces impressions nouvelles semble renaître à des idées plus vives, plus ardentes, plus colorées, plus jeunes enfin; le cœur bat sous l’impulsion de sentiments plus généreux; par une irrésistible expansion, l’homme s’identifie, se confond avec la nature. En harmonie avec elle, il est heureux. […]

Il se sent rempli d’une tendresse émue pour les plus insignifiantes fleurettes d’avant-garde, pour le plus modeste mouron, pour la plus petite drave printanière qui, sous une feuille morte, victime de la dernière bise d’automne, montre sa tige naissante. Ainsi, il est témoin attendri d’un renouveau auquel il n’échappe pas lui-même.

 

La gravure est extraite du journal La Patrie, 31 mai 1902.

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