L’invention de l’hélice à spirale pour les bateaux, coup de génie
Sur l’eau, la roue à aubes représenta un certain achèvement, c’est certain, mais fut très bientôt limité, «fragile» même. Le mécanicien et ingénieur français Frédéric Sauvage (1786-1857) était convaincu qu’il y avait mieux. Le 13 septembre 1881, on lui élève une statue à Boulogne-sur-Mer, sa ville natale en France. Le 29 septembre, de Québec, Le Canadien raconte. Reportage.
On a inauguré hier à Boulogne-sur-Mer la statue de Frédéric Sauvage, inventeur de l’hélice.
Sous la Restauration [de 1814 à 1830], les bateaux à roues fonctionnaient bien sur les rivières, moins bien à la mer, et tout à fait mal, comme de juste, au moment des batailles navales. Sauvage chercha un moyen pratique de soustraire la navigation aux inconvénients qui grandissaient à mesure que le nombre des navires à vapeur augmentait. Il s’inspira fort ingénieusement de la godille des petites embarcations pour arriver à l’hélice. Ce n’était pas difficile; le tout était d’y penser. (Voir l’histoire de Colomb et de l’œuf).
Sauvage remarqua l’agilité avec laquelle couraient ces chaloupes qu’on croise dans tous les ports, et qui marchent à l’aide d’une seule rame, qu’un seul homme agite, à l’arrière, d’une certaine façon.
En décomposant la direction des forces produites, il arriva à déterminer la meilleure forme et la meilleure place qui puissent être données aux ailettes tournantes, qui prirent nom d’hélices, puisqu’elles représentent exactement cette figure bien connue de la géométrie.
L’hélice a depuis fait merveille.
Les navires à aubes ont disparu de toutes les marines, ou à peu près.
C’est à peine si quelques paquebots faisant de petits trajets sont encore pourvus de ces moyens primitifs. L’hélice a été appliquée à tous les navires neufs sans exception, et aujourd’hui c’est par milliers qu’on peut compter les bâtiments à hélice qui sortent chaque année des chantiers anglais, français, américains et allemands.
Dans la marine militaire, l’hélice a mis les bâtiments à l’abri des accidents causés aux propulseurs par les boulets. Le canot à vapeur a remplacé les embarcations à rames et à voiles. Un petit appareil, grand comme une machine à coudre, une tige de fer et une petite hélice, constituent un moyen de locomotion simple et rapide comme le vent.
L’hélice a donné aux bâtiments la sécurité et la vitesse. Elle les fait cependant dévier un peu de leur marche, par un phénomène assez singulier, et force la timonerie à être sans cesse en éveil, pour suivre exactement la route voulue.
Il suffit pour s’en convaincre de se placer à l’arrière d’un paquebot et de regarder le sillage. Malgré toute l’adresse du timonier, la traînée blanche d’écume n’est jamais correcte. La ligne suivie est directe; elle n’est pas strictement droite.
Le journal Le Canadien a pris ce texte dans le Courrier de Bruxelles du 14 septembre 1881.
La statue de Frédéric Sauvage à Boulogne-sur-Mer apparaît sur la page Wikipédia consacrée à cet ingénieur (Jules-Isidore Lafrance — Travail personnel Ottaviani).