Ça se passe aux États-Unis
Une scène romanesque s’est déroulée ces jours-ci au tribunal de police de Jersey City. Joseph Able, marmiton dans un restaurant, venait d’être condamné à $10 d’amende pour quelque peccadille, et, comme il n’avait pas de quoi payer, on venait justement de le ramener en prison, lorsqu’une jeune fille, les larmes aux yeux, se précipite dans la salle d’audience et va droit au juge.
«Je vous en supplie, dit-elle, ne l’envoyez pas en prison. Je n’ai que $5; mais les voilà, et laissez-le sortir.»
Le juge étonné interroge la jeune fille et lui demande pourquoi elle s’intéresse tant au prisonnier.
«C’est mon cousin, répond-elle. Je vous en prie, laissez-le sortir.»
Mais le juge de plus en plus intrigué lui dit de s’asseoir et d’attendre quelques instants. Puis il fait ramener le prisonnier et lui demande s’il ne voit aucun de ses parents dans la salle. Sur sa réponse négative, le juge lui demande alors, en lui montrant l’inconnue : «Quelle est donc cette jeune fille ?»
«C’est ma fiancée, répond Joseph d’un air abattu, et nous devons nous marier aussitôt que j’aurai une place stable.»
Mais, tout à coup, la jeune fille avait aperçu Joseph et, souriant à travers les larmes qui lui coulaient sur le visage, elle se précipitait dans ses bras. Le juge s’efforce de tousser pour cacher son émotion, puis demande à Joseph : «Able, désirez-vous épouser cette jeune fille ?»
«Certainement, votre Honneur.»
«Et vous, jeune fille, poursuivit le juge, désirez-vous épouser Joseph ?»
«Mais sans doute, réplique-t-elle. N’est-ce pas Joseph ?»
«Joseph, reprend le juge, votre amende vous est remise. Prenez la main de votre fiancée et je vais vous marier.»
Quelques instants après, Joseph et sa femme sortaient du tribunal bras dessus bras dessous.
La Patrie (Montréal), 4 septembre 1886.
Un juge romantique…Merci M. Provencher pour cette belle histoire d’amour !
Merci beaucoup, chère Vous. Beau dimanche à Vous.