Le télégraphe fait la Terre plus petite
Un nouveau bateau français bien rapide en fait la preuve. La Patrie du 5 mai 1906 raconte.
Les autorités de la ligne française ont raison d’être fières du double record de télégraphie sans fil et de vitesse établi par leur nouveau paquebot, «La Provence», pour son premier voyage à travers l’océan.
Du Havre à New-York, il a fait le voyage en cinq jours, vingt-trois heures et quarante minutes. L’ancien record était détenu par «La Lorraine» qui avait fait la traversée en six jours, neuf heures et vingt minutes.
Le record de télégraphie sans fil a été même encore plus satisfaisant. Les navigateurs ont toujours eu l’ambition de communiquer avec les deux rives de l’océan en même temps, mais personne n’avait pu réussir jusqu’à ce jour. Cet honneur devait échoir au nouveau navire français, qui possède un mât à signaux très haut et des batteries d’une puissance extraordinaire.
L’opérateur du télégraphe, à bord de «La Provence», est resté constamment en communication avec Poldhu, sur la côte de Cornwall.
À 1,800 milles de Poldhu et à 1,700 milles du Cap Cod, «La Provence» a reçu les dernières nouvelles du désastre de San Francisco. Ces nouvelles étaient immédiatement publiées par le quotidien du vaisseau, le «Journal de l’Atlantique».
Pendant que l’opérateur de «La Provence» prenait un message du désastre de San Francisco, l’instrument est devenu tout à coup silencieux. Quelques minutes plus tard, l’instrument fonctionna de nouveau, mais au lieu des nouvelles du tremblement de terre, c’était une information peu importante de New-York.
L’opérateur demanda alors à Poldhu : «Pourquoi mêlez-vous ainsi les messages ? Continuez avec les nouvelles de San Francisco.»
«Je ne suis pas Poldhu, a-t-on répondu, j’envoie des messages du Cap Cod en Amérique. Qui êtes-vous ?»
«C’est «La Provence», paquebot français, répondit l’opérateur de «La Provence». Dites que nous sommes tous bien. Attendez un instant, je vais finir avec Poldhu.»
On conçoit que les passagers furent contents d’apprendre, au déjeuner, que le télégraphe avait communiqué avec les deux rives de l’océan en même temps.
La photographie du paquebot La Provence provient de la page Wikipédia qui lui est consacrée.